future in my hands (aliyah & eli)

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

Il a posté cette annonce sans grande conviction - pas de photo, parce qu’il n’en a pas, et la mention repris de justice notée pour ne pas surprendre avec son bracelet le jour de la rencontre. Alors forcément, quand il reçoit le mail indiquant qu’il vient de recevoir une proposition de petit boulot, Eli est plus que surpris, et croit d’abord à une mauvaise blague. Après tout, la question à se poser est simple, qui donc souhaiterait embaucher un gars comme lui, et ce, peu importe le petit job prévu ? Si les rôles étaient inversés, il y a fort à parier qu’il n’aurait jamais contacté cedit repris de justice - mais peut-être que c’est parce qu’il les a vu de près et qu’il sait quel genre de fou peut se trouver entre ces murs. Evidemment, il ne dit pas tout ça à celle qui le contacte - Aliyah -, bien au contraire ; il répond simplement, accepte la proposition et convient d’une date sans en parler à personne, y’a pas de quoi être fier d’avoir trouvé un job,  c’est pas quelque chose qu’il veut crier sur tous les toits.

Quand il arrive devant l’immeuble, il hésite. C’est peut-être mieux de rentrer chez lui et de dire qu’il est malade ; il a pas envie de faire la causette et puis, il a pas non plus envie de trimer pour quelques malheureux pounds. L’idée des quelques pièces pour ces heures de travail lui rappelle immédiatement la raison pour laquelle il est désormais équipé d’un joli bijou à la cheville. Il gagnait beaucoup plus, en faisant beaucoup moins ; le retour à la réalité est difficile à digérer.

Il sonne ; puis monte les marches, tout ça sans se dégonfler ce qui semble être un exploit à chaque pas qu’il fait. Chaque marche lui fait réaliser que sa vie est désormais ainsi, à enchaîner les petits boulots à la con pour se faire quelques sous, attendant qu’un vrai job lui soit confié qu’il devra supporter malgré les horaires, malgré les contraintes, affichant un sourire devant le patron. C’est pas reluisant, et c’est sûrement pour ça que, quand la porte s’ouvre, il affiche déjà une mine déconfite. « Salut. » qu’il lâche alors, un ton familier déjà présent. « J’suis Eli, pour le job ? » Il ne sait même pas vraiment ce qu’il vient faire ici, a noté une liste de compétences - peinture, montage de meuble, remplacement d’ampoule et autres tâches plutôt simples et accessibles. Alors qu’il observe celle qui a osé le contacter malgré les mots un peu inquiétants sur le CV, il ne peut s’empêcher de laisser sa main tapoter sa cuisse - un signe de sa nervosité, le seul et l’unique. Comme souvent, des notes montent dans son imaginaire et il se créé un tempo ; ça le rassure, cette musique, ça le calme. Il n’en montrera pas plus.

Black cat, nine lives

@Tessa Mulligan ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

”Tu vas trop Ali. Un repris de justice pour faire des travaux dont tu n’as pas besoin ? Tu as pensé à Lola ?”m’a tancé ma mère. Quelle chance d’avoir opté pour cette optin plutôt que celle de la visite. Nous nous serions disputées : j’ai levé les yeux au ciel et elle déteste ça. ”Elle sera à l’école. Je ne suis pas stupide.” ”Évidemment. Mais, s’il t’arrivait quelque chose ? Si…””ça va. J’ai compris.”l’ai-je interrompue faute à melting pot d’émotions contraires. La première appartient à la déception. J’ai toujours concédé à ma mère le don de la tolérance. La seconde découle de la pertinence de son argumentation. Je ne le connais pas. Cet homme auquel j’ai choisi de tendre la main. Néanmoins, je suis trop fière pour l’admettre et trop résolue pour renoncer. C’est tout ‘objet de ma troisième sensation. Je nourris l’intime conviction que le monde a commencé à tourner mal le jour où bonté et altruisme sont devenus insultants dans la bouche des autres, insultants et dignes des plus vils défauts. En l’état, décommander est impensable, mais que lui répondre à ma maman ? Comment la rassurer quand j’entends son inquiétude ? Désarçonnée, j’ai soupiré, réfléchissant à une solution susceptible d’apaiser ses craintes. ”Et si tu m’appelais ?” ai-je proposé forte de mon idée.  ”Il arrivera vers 9 heures. Je t’enverrai un message tous les quarts d’heures et si je le fais pas, tu m’envoies la police ? D’accord ? Elle a accepté de mauvaise grâce, lucide sur ce que je ne changerai pas d’avis. J’ai déploré qu’elle commente mon obstination d’un “ta bonté te perdra”. Qu’est-ce que ça veut dire exactement ? Que je suis un danger pour moi-même ? Que je vais briser ce qu’il reste de ma famille à force de m’impliquer pour mon prochain au lieu de m’investir dans les miens ? De les régler les uns après les autres comme s’y attèlera une femme courageuse ? J’ai passé la soirée à remettre mon comportement en question et, pour m’occuper, j’ai cuisiné une bonne partie de la nuit. Rien d’étonnant au raté de mon réveil. Pour peu, ma fille aurait été en retard à l’école. Nul doute qu’elle doit sa ponctualité à sa docilité. Malgré mon humeur, elle s’est activée et, plus tard, alors que j’attends dans ma cuisine l’arrivée du dénommé Eli, je m’en suis voulue d’avoir manqué de douceur. Peut-être qu’il est l’heure de m’émanciper de l’avis de ma mère. La preuve en est, ce jeune homme n’a pas l’allure décrite par les clichés entretenus par la doyenne. ”Salut. Je suis contente de te voir. Je t’ai préparé tout ce qu’il faut dans la chambre.” La mienne, en l'occurrence, quoiqu’elle n’avait pas réellement besoin d’un coup de frais. J’ai considéré que c’était préférable à celle de ma fille. En attendant qu’elle soit prête, je dormirai avec elle d’ailleurs : ce n’est pas un problème. Au contraire, elle y trouvera son plaisir. ”Tu sais mettre en couleur, n’est-ce pas ? Je t’ai mis le papier-cache, les pinceaux et la couleur que j’ai choisie. Tu veux un café ? Un verre d’eau ? Avant que je te dise pourquoi tu es là ? On n’est pas à la pièce et puis, tu as l’air nerveux, je me trompe ? Faut pas. Je suis sympa, tu verras. Enfin, c’est ce qu’on dit.”  

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

Elle a pas l’air méchante, elle a pas l’air complètement folle non plus, ni désespérée, pas pauvre au point de n’avoir que ce choix-là. Non, en fait, elle a l’air plutôt normale et finalement, Eli réalise qu’il ne s’attendait pas à ça, il avait des aprioris et Aliyah ne correspond en rien à ce qu’il avait imaginé. Comme quoi. « Salut. Je suis contente de te voir. Je t’ai préparé tout ce qu’il faut dans la chambre. » Droit au but, comme il aime. Y’a pas besoin de parler mille ans pour se lancer dans un job, il est prêt à enfiler ses écouteurs et à se lancer à corps perdu dans la tâche pour éviter de trop penser au fait que sa vie se résume désormais à ça ; qu’il est tombé aussi bas. Des petits boulots pour ramener quelques sous et des entretiens d’embauche qui lui donnent envie de retourner en prison plutôt que de passer la journée à bosser pour des cons ; mais bon, il paraît qu’il a pas trop le choix.

S’il pense que la conversation s’arrête là, il ne peut qu’être déçu quand il voit que la femme a d’autres choses à lui dire. « Tu sais mettre en couleur [...] Enfin, c’est ce qu’on dit. » Bouche ouvert et yeux fatigués, Eli met quelques secondes avant de réagir. « Ah ouais. » qu’il exprime, étonné avant de réaliser qu’il ferait mieux de ne pas aller trop loin dans ce qu’il va dire ; faut dire qu’il était prêt à dire à Aliyah qu’elle parlait un peu trop, une chance qu’il ait su se retenir. « ça fait beaucoup de questions. » qu’il préfère répondre, un petit sourire en coin moqueur qui commence à se former, c’est le naturel qui revient au galop. « J’pense que c’est toi qui a l’air nerveuse. » qu’il contre finalement, préférant taquiner que montrer qu’elle n’a pas tout à fait tort et qu’il ressent en effet de plus en plus de stress à l’idée d’être ici ; et ce, pour tout un tas de raisons. « Mais je veux bien un verre d’eau ouais. » Il évite de répondre à sa question concernant la mise en peinture ; il a fait deux-trois trucs dans ce genre quand il était en prison mais il ne peut pas en garantir la qualité et il sait pertinemment que s’il se met à avouer une telle chose, le job risque finalement de lui passer sous le nez et il aura fait le déplacement pour rien. Alors qu’il récupère son sac à dos, il l'ouvre et en sort rapidement une feuille. « Tu peux me signer ça steuplait ? » Sur la feuille, des détails sur lui ; son nom, prénom et âge, son numéro de prisonnier et tout un tas d’informations concernant la prison. C’est simple, il doit ramener ce papier avec les noms des gens pour qui il a pu travailler, une preuve qu’il ne passe pas ses journées à rien faire. C’est son conseiller qui va être content. « J’peux rentrer ? » qu’il demande enfin, toujours sur le perron.

Black cat, nine lives

@Tessa Mulligan ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

Dieu ce que j’aurais aimé que ma mère soit là. Elle aurait appris à la dure à quel point ses clichés sont ridicules. Non, il n’a pas l’air patibulaire faute à une barbe d’une semaine, il n’a pas les cheveux sales et mal coupés. Il est plutôt présentable et, intérieurement, je suis fière d’être ce que je suis, de cette confiance que je nourris pour l’Homme, preuve que je survole les principes de méfiance de ma famille. Je ne la juge pas : elle est méfiante faute à son expérience d'immigrée. J’aurais toutefois apprécié qu’elle utilise les enseignements de son histoire pour s’ouvrir les esprits. Elle comprendrait mieux pourquoi j’ai tendu la main à ce jeune homme dans le besoin puisque maman ne tient pas figure d’exception dans ce monde. Combien de patrons potentiels lui ont fermé la porte à Monsieur Cash ? Puis-je lui poser la question ? J’en doute. Le travailleur semble dépassé par mes babillages. Je pourrais voir ses cheveux s’envoler tant je parle vite, trop vite pour lui. C’est davantage la preuve de mon enthousiasme que de ma nervosité. Bien sûr, elle existe, mais j’y reviendrai plus tard.   ”Ouais, je te jure” ai-je ponctué sans me soucier d’un éventuel scepticisme dans le fond de sa voix. Je préfère m’arrêter sur un   ”On dit aussi que je parle trop… N’hésite pas à le dire quand j’exagère. Je jauge pas toujours bien quand je dois me taire ou quand c’est pas nécessaire.” J’ai ponctué mon conseil d’un clin d’oeil suggérant que la susceptibilité ne m’étouffe pas. Au contraire, j’apprécie la franchise et, le cas échéant, de constater qu’Eli aura au moins retenu l’essentiel : il veut bien un verre d’eau.

Normalement, j’aurais profité de l’occasion pour l’inviter à rentrer. Sauf que, soufflée par son commentaire, je l’ai évalué avec gravité, sans broncher, négligeant la bienséance tandis que je récupère le formulaire qu’il me tend. Nous n’avons rien à faire dans le hall. Aucune discussion n’est à conduire sur un palier. Alors, sans jeter un coup d’oeil sur le bout de papier, je renoue avec les principes de l’hospitalité.   ”Oui, bien sûr. Excuse-moi. Entre. Tu es en probation ?” ai-je demandé en refermant derrière lui. Je lui ai ensuite indiqué la cuisine et, le devançant, je lui ai servi de quoi se désaltérer.   ”Et, non, je suis pas nerveuse. C’est vrai que je ne suis pas habituée à recevoir des inconnus chez moi, mais je suis plutôt contente à l’idée d’avoir une toute nouvelle chambre. Je veux pas que tu t’imagines que ça a quelque chose à voir avec ça.” J’ai tapoté le bout de papier au préalable posé sur mon plan de travail, j’ai glissé son verre vers lui et, tirant un bic de mon sac à main, je l’ai signé sans le lire. ”La pièce est pas très grande. Tu n’en auras pas pour des jours.” Il ne gagnera pas de quoi se payer un loyer.   ”Mais, je connais un peu de monde. Je pourrais te recommander si tu veux.” ai-je conclu pour mieux me taire, enfin, consciente que si j’ouvre la bouche il s’en échappera une indiscrétion sur les raisons de son incarcération. Ce serait trop tôt cependant. Beaucoup trop tôt.
 

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

C’est ridicule, c’est la seule chose qu’il peut se dire face à la situation qu’il est en train de vivre ; face aux heures de travail qu’il va devoir réaliser pour quelques maigres pièces. Pas étonnant que la réinsertion soit difficile pour une majorité de personnes incarcérées pour trafic de drogues, c’était bien plus simple quand il n’avait qu’à rester installé au fond de son canapé - manette de console à la main - et à attendre que ses habitués toquent à la porte lui acheter quelques grammes. Et même s’il sait que ce genre de pensées doivent être évitées pour ne pas qu’il file tout droit vers la case récidive, il ne peut pas s’empêcher de regretter son passé. C’était tellement plus facile avant. « On dit aussi que je parle trop… N’hésite pas à le dire quand j’exagère. Je jauge pas toujours bien quand je dois me taire ou quand c’est pas nécessaire. » Ce serait bien le genre d’Eli de lui faire la remarque en plein milieu de sa phrase ; car il peut pas mentir et dire qu’elle ne parle pas beaucoup, ce ne serait pas la vérité. Mais il se retient - ce qui est une chose rare chez l’ex-détenu -, après tout il commence à peine ce job, il vaut mieux éviter de se mettre les gens à dos, quoiqu’elle dise sur sa capacité à entendre ce genre de remarques, mieux vaut ne pas prendre le risque.

Ce qu’il n’hésite pas à faire, en revanche, c’est de constater qu’il n’a toujours pas pu pénétrer l’appartement - ce qu’il fait donc quelques secondes plus tard. « Oui, bien sûr. Excuse-moi. Entre. Tu es en probation ? » Suivant Aliyah dans la cuisine, Eli observe un peu les lieux ; c’est bien plus grand que là où Joseph et lui vivent actuellement - et mieux décoré également. « Ouaip, c’est ça. » Chaque fois qu’on lui pose la question, il ne peut que sentir le bracelet se faire lourd sur sa cheville, lui rappelant que cette liberté n’est pas réelle et qu’il lui reste encore deux bonnes années sans connerie pour pouvoir y goûter réellement. « Et, non, je suis pas nerveuse [...]  Je veux pas que tu t’imagines que ça a quelque chose à voir avec ça. » Eli ne peut qu’hocher les épaules, indiquant que ça n’a pas vraiment d’importance à ses yeux ; ça ne le surprendrait pas que ce soit lié à sa probation, ce serait même plutôt normal. « Je m’imagine rien du tout. » Bon, un peu quand même, mais de toute façon, il ne pourrait pas lui reprocher. Faut dire qu’elle n’a aucune idée de la raison pour laquelle il se retrouve en probation aujourd’hui, il pourrait avoir commis des crimes plus graves que ce qu’il n’a fait en réalité qu’elle n’en saurait rien puisqu’il ne l’a pas indiqué dans son annonce. Ce n’est même pas écrit sur ce bout de papier ; vraiment, il pourrait être n’importe qui. « Et puis au pire c’est pas grave hein, j’ai l’habitude. » Faut dire qu’il a la tête de l’emploi et que depuis qu’il est gosse, un regard vers lui suffit à vouloir rapprocher son sac à main de soi. A juste titre, il l’aurait très certainement chippé.

Elle est gentille, et franchement, ça l’énerverait presque. « Mais, je connais un peu de monde. Je pourrais te recommander si tu veux. » Il hoche la tête, les lèvres pincées alors qu’il commence à s’impatienter. La vérité c’est qu’il a pas l’habitude qu’on lui tende la main de la sorte et qu’il est pas sûr de comprendre les raisons derrière. Difficile de faire confiance, impossible même. « Ouais, ok. » qu’il se contente alors de répondre, Eli n’étant pas le genre de personne à remercier qui que ce soit. « Bon tu me montres la chambre ou on continue à papoter ? » ça se voit sûrement qu’il s’impatiente, pas bien poli et pas habitué à faire la causette pendant des heures. Il tourne trop vite en rond alors il engloutit son verre d’eau d’une traite avant de suivre Aliyah jusque dans ladite chambre. Parsemés dans la maison, quelques indices qui ne peuvent que lui rappeler ses petites soeurs. « T’as des gosses ? » qu’il demande alors, pour une fois un peu curieux d’autre chose que de sa propre personne.

Future in my hands

@Eli Cash ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

Loin d’être susceptible, je ne m’offusque pas d’un sous-entendu à propos de mes babillages. Pas plus que je ne me vexerais s’il exprimait son irritation à le faire. Je suis lucide sur les travers de ma personnalité, sur ma faculté à transformer mes qualités en défauts. N’étais-je pas la garante des bonnes intentions quand je l’ai accueilli telle une vieille connaissance ? N’ai-je pas essayé de le rassurer au sujet d’éventuels préjugés en l’avisant que j’en étais dénuée ? J’ai brillé par ma sincérité, mais la maladresse et d'indiscrétions l’ont ternie malgré moi. Résultat ? Je suis à l’aise. Je joue avec mon bic. Je piétine et ramasse le verre vide pour le déposer dans l’évier. Je me demande à quel moment j’ai égaré mes bonnes manières et me rassure en disciplinant mes envies de jacasser encore., toujours, parce que les silences m’embarrassent. Que pourrais-je ajouter de toute façon ? Que je suis désolée si, d’aventures, je l’avais froissé ? Je l’observe et, Eli, il a l’air tout à fait à l’aise. Pressé, sans doute, et ce n’est pas étonnant. Je suppose qu’il a hâte de commencer parce que plus vite il aura terminé, plus vite il pourra retourner à ses occupations. Quelles sont-elles, d’ailleurs ? Comment occupe-t-il ces heures où il a le droit de sortir de chez lui ? J’imagine qu’il a autour de la cheville un bracelet électronique, mais j’évite de jeter un direction vers ses pieds, comme si constater un renflement sous le tissu de son pantalon avait une quelconque importance. Il n’est pas un animal de cirque. Ma curiosité n’a jamais été malsaine et je tiens pour responsable de mon malaise les discours de ma mère.  A mon âge, qu’elle parvienne à remplir ma tête de conneries est une honte et, sous le joug de ses pensées, j’ai rougi et  j’ai cessé de prêter des émotions à mon interlocuteur. Le mieux est parfois l’ennemi du bien. Alors, je ne l’ouvre que pour l’inviter à me suivre jusqu’à ma chambre. ”Je t’ai déposé le matériel juste là.” J’ai désigné le coin de la pièce une fois la porte ouverte en grand. ”Il y a même des bâches pour cacher les meubles et mon lit aussi.” Je le tiens de ma grand-mère, mais l’information est inutile puisqu’Eli ne semble pas disposée à converser. Du moins l’ai-je supposé, mais peut-être à tort : sa question m’étonne. ”Oui. J’en ai une. Et, je présume que toi, non, parce que sinon tu saurais que c’est dangereux de parler de son enfant à une maman, surtout quand elle est bavarde. Tu aimes vivre dangereusement;.. je pourrais te parler de ses talents, te dire à quel point elle est merveilleuse. Mais, je serai sympa, je me contenterai de te dire qu’elle a huit ans et qu’elle s’appelle Lola. Elle est à l’école, là.” Comme la majorité des enfants de son âge. ”Et, du coup ? J’ai raison ? Pas d’enfants pour toi ?” Je me serais bien assise sur le bord de mon lit, mais une question ne définit en rien qu’il est disposé à discuter. Alors, je me suis adossée contre le mur le temps de recueillir une réponse.  ”Ou une copine ? Avec des projets d’enfant ? Ca change la vie, un enfant. Mais, en bien, contrairement à ce que certains peuvent dire. Enfin, c’est pas la question. Je vais te laisser bosser. Si tu as besoin de quelque chose n’hésite pas. Puis, j’ai promis des cookies à ma fille. Je n’en apporterai des tout chauds quand ils sortiront du four au cas où tu aurais un petit creux.” Je me suis donné le feu vert pour retrouver la cuisine. Sauf que je n’ai pas bougé.
 

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

Après ce petit moment un peu trop long au goût d’Eli, le travail pour lequel il a été missionné peut enfin commencer. Il se retrouve dans la pièce et observe un peu les alentours et tout le matériel mis à disposition - il s’agissait là d’une obligation car lui n’est évidemment équipé de rien, il s’estime déjà heureux d’avoir des vêtements à porter. Il observe un peu le travail et se décide, il doit évidemment commencer par bâcher toute la pièce afin d’éviter que des éclaboussures arrivent sur les meubles. Mais avant de se lancer dans la mission, il laisse sa curiosité parler pour lui, persuadé qu’il ne récoltera qu’un simple oui ou non et qu’il pourra ensuite passer à autre chose, fier d’avoir été agréable et posé une question. Il ne pouvait pas être plus loin de la vérité car voilà qu’Aliyah se lance dans une explication concernant son enfant. Au lieu de l’ennuyer, ça le touche. Aja - sa mère à lui - n’a jamais passé plus d’une seconde à parler de ses enfants, encore moins avec cette lueur de fierté dans le regard. Non, pour elle, les enfants étaient plus une chose qu’on avait sans vraiment s’en soucier ; pire, quelque chose qui devenait très vite encombrant. Les enfants ont dû apprendre à se faire tout petit et le placement n’a pas aidé à lui faire prendre conscience de la situation, elle qui n’a même pas souhaité maintenir un lien. Face à lui, la preuve vivante qu’autre chose existe et ça le rend jaloux tout autant que ça le touche pour de vrai. « Et, du coup ? J’ai raison ? Pas d’enfants pour toi ? » Il est sorti de sa petite rêverie par cette simple question qui vient néanmoins lui arracher un rire ; ça semble en effet évident, la preuve, elle l’a deviné ! « Oula, non ! Pas d’enfant, ni maintenant ni jamais. » Il s’est jamais vraiment posé la question à vrai dire, c’est juste quelque chose de logique dans sa vie : il n’aura pas d’enfant. Y’a plusieurs raisons à ça, trop égoïste pour vouloir mettre sa vie de côté pour une autre personne, trop immature pour pouvoir élever un enfant, trop plein de choses. « Ou une copine ? Avec des projets d’enfant ? Ca change la vie, un enfant. Mais, en bien, contrairement à ce que certains peuvent dire. Enfin, c’est pas la question. Je vais te laisser bosser. Si tu as besoin de quelque chose n’hésite pas. Puis, j’ai promis des cookies à ma fille. Je n’en apporterai des tout chauds quand ils sortiront du four au cas où tu aurais un petit creux. » Après ce nouveau petit monologue, il ne se souvient même plus de la question ; non pas qu’elle soit d’une importance capitale. Il n’a pas de projets, pour le moment le seul but dans sa vie c’est d’avancer sans faire un faux pas, c’est déjà pas mal. Mais y’a un truc chez Aliyah, un truc qu’il sent chez elle et qui fait qu’il la trouve de moins en moins pénible. « Tu veux rester ? » qu’il demande alors d’une traite avant de regretter mais de poursuivre malgré tout. « Tu pourras me dire quels sont les talents de Lola et à quel point elle est merveilleuse. » Il rigole mais finalement, une compagnie qui parle pourrait être bénéfique - ça fait un peu taire les trop nombreuses fois dans sa tête. Il se lance tout de même dans le travail, récupérant une bâche et du scotch pour venir l’appliquer sur les meubles et le sol. Il s’applique. « Pas d’enfant mais j’ai des sœurs, et franchement des fois c’était tout comme. » C’est sûrement ça qui l’a vacciné à l’idée d’avoir sa propre famille un jour ; il a déjà joué ce rôle et ne veut pas spécialement que cela se reproduise.

future in my hands

@Eli cash ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

Il n’a pas envie de discuter, Eli. Je l’agace et c’est tangible. Je ne lui en tiens pas rigueur cependant. Il n’a pas signé pour ça : il n’est ni coiffeur ni dame de compagnie. je ne peux pas lui reprocher d’être consciencieux ou peu sensible - voire pas du tout - à ma bonhomie. Alors, quoique je sois embarrassée, je l’ai conduit jusqu’à la chambre sans perdre le sourire. Cette fois, je me suis contentée des seules indications nécessaires à la réalisation des travaux. Pas un mot de plus ou de trop. Sauf qu’à mon grand étonnement, il m’a relancé d’une question qui n’est pas anodine pour une mère de mon espèce. Quand le discours des femmes actuelles insistent sur l'importance d’en rester une, j’ai fait tout le contraire. Lola est le centre de mon univers. Je tourne autour d’elle comme la Terre autour du soleil. Je me suis oubliée sans regret, car à l’annonce de ma grossesse, elle est devenue ma priorité. Parfois, je me fais la réflexion que je n’aurais jamais quitté Mickey si je n’avais pas concentré mes forces sur ma gamine. J’aurais pu les utiliser pour l’aider à s’en tirer. Je me demande aussi si je n’ai pas fait plus de mal que de bien à mon enfant en raccrochant mes gants. Puis, je me raisonne. Je me souviens de mes combats pour convaincre son père qu’ils ont besoin l’un de l’autre.  Je me rappelle aussi qu’aujourd’hui il est parti sans donner d’adresse et de ma colère découle la certitude que la cette rupture m’aura sauvée et, par conséquent, Lola aussi. Lola. Je pense à elle et mon sourire s’agrandit. Je parle d’elle et mon coeur se gonfle de fierté. J’en néglige mes résolutions, je babille de nouveau. Pire, j'émets des hypothèses, je m’étonne sans mot dire de ces certitudes et j’accepte sa proposition sans l’ombre d’une hésitation.  ”Le temps que tu prépares la pièce. Après, je vais faire les cookies de ma fille, je les lui ai promis.” ai-je annoncé pour me discipliner alors que je m’assois sur le rebord de mon lit.  ”Elle dessine. Vraiment bien. Elle y passe des heures et son professeur de dessin m’a déjà dit qu’elle avait beaucoup de talents. Moi, je pense que je ne suis pas objective. Je trouve qu’elle réussit tout ce qu’elle fait. Par exemple, elle a envie de faire de la boxe.” Dans l’espoir de se rapprocher de son père, de lui ressembler, de partager un peu de ce qui aura été sa vie et sa passion. Moi, je n’aime pas ce sport. Il n’est que violence pure, dure et il m’a toujours effrayé. Mais, quel genre de mère serais-je si je l’en empêchais ? Une hypocrite… sans doute.. alors que je ne cesse de lui chanter qu’elle ne peut pas en vouloir à son père d’être parti sans plus donner signe de vie, que c’est provisoire. Ce que je cache, c’est que je suis en colère pour nous deux. Du reste, je n’ai pas le sentiment de lui mentir : il refera surface, c’est indiscutable.  ”Et je suis sûre qu’elle sera très douée.. Et là, par contre, je pense que je ne m’avance pas trop uniquement parce que je suis sa mère. Et toi ? Tu fais un sport ? ” A sa carrure, je penserais au rugby : je ne mettrais pas ma main au feu.  ”Tu en as combien, des soeurs ? Tu t’en occupes beaucoup ?” ai-je supposé puisqu’il les compare à une enfant. Comment ont-elle vécu son incarcération, alors ? Est-ce trop tôt pour lui poser la question qui me travaille ?  ”Elles sont plus jeunes que toi je présume. ” 

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

Il change d’avis comme de chemise, faut dire que y’a deux facettes de lui qui se battent en duel là tout de suite : la facette de lui qui n’aime ni entendre les histoires des autres ni faire du blabla inutile ; et celle qui a de plus en plus de mal avec le silence, trop habitué ces dernières années à un bruit ambiant qui ne cesse jamais - les cris, les bruits de clés, les bruits de porte, les gens qui tapent, qui hurlent, qui pleurent. Y’avait de tout en prison et même si on se persuade qu’on ne s’habituera jamais à une telle vie et que l’extérieur sera signe de retrouvailles avec la réalité, c’est pas spécialement comme ça que ça se passe et il peine le soir à s’endormir - forcé de mettre un bruit de fond pour réussir à trouver le sommeil. Sa nouvelle normalité n’est pas celle qu’il avait imaginée et ça se vérifie encore aujourd’hui, préférant écouter sa patronne du jour jacasser que de se retrouver seul avec ses pensées les plus profondes. Indécis, le garçon. « Le temps que tu prépares la pièce. Après, je vais faire les cookies de ma fille, je les lui ai promis. » ça lui convient, il enchaînera avec un peu de musique quand elle retournera à ses cookies ; c’est un bon compromis et il s’attelle alors à la tâche de bâcher tout ce qu’il faut dans la pièce pour éviter que cette dernière ne se retrouve emplie de tâches de peinture. Si ça semble simple comme ça, il prend le temps de le faire afin de s’assurer que ce soit fait correctement - si c’est bâclé, ce sera la catastrophe. A mesure qu’il couvre les meubles et le sol, il l’écoute parler avec passion de sa fille. « Elle dessine. Vraiment bien. Elle y passe des heures et son professeur de dessin m’a déjà dit qu’elle avait beaucoup de talents. Moi, je pense que je ne suis pas objective. Je trouve qu’elle réussit tout ce qu’elle fait. Par exemple, elle a envie de faire de la boxe. » « De la boxe ? » qu’il demande alors, surpris. C’est sûrement son esprit toujours trop étriqué qui parle mais il n’imagine tout simplement pas une petite fille sur un ring de boxe et peine à comprendre comment on peut passer de peindre des jolis papillons à vouloir taper des gens. « Elle se fait embêter à l’école ou quoi ? » qu’il demande alors, n’imaginant que cette possibilité. Un scotch de plus. « Et je suis sûre qu’elle sera très douée.. Et là, par contre, je pense que je ne m’avance pas trop uniquement parce que je suis sa mère. Et toi ? Tu fais un sport ? » Encore une fois, il a du mal à imaginer une enfant être douée dans un sport de combat ; mais ces pensées ne lui viennent que d’une éducation un peu trop macho qu’il perpétue sans s’en rendre compte. « Ah ouais ? C’est le genre à se bagarrer ? » Serait-il en train de s’intéresser à autre que lui ? « Juste de quoi me maintenir en forme ; poids, course, ce genre de trucs que tu peux faire en… sans matériel. » prison le mot interdit, le mot qu’il a pas spécialement envie de mettre là tout de suite dans la conversation. Pas de club de peinture ou de boxe à l’intérieur, juste une cour qu’il a arpenté en long en large et en cercle, et du matériel plus que rudimentaire pour éviter que les loups en cage ne se retrouvent à trop se taper sur la gueule ; ce qu’ils font quand même.

« Tu en as combien, des soeurs ? Tu t’en occupes beaucoup ? » Les filles sont la seule famille qui lui reste et il a fait suffisamment de conneries pour que la situation soit désormais bien compliquée ; ils étaient si proches quand ils étaient gamins, Eli et Evie ayant tous deux pris le rôle de parents pour palier aux vrais - si déficients qu’il aurait été préférables qu’ils soient inexistants. Quand la famille a éclaté, que certaines se sont retrouvées en famille d’accueil, lui en foyer, rien n’aurait pu l’empêcher de les retrouver plusieurs fois par semaine pour leur raconter la suite de l’histoire qu’il inventait au fur et à mesure. Puis les choses ont changé, par sa faute, et il récolte aujourd’hui plus de silence que de sourires. « J’en ai quatre. » qu’il répond alors, quatre connues, en tous cas. « Elles sont grandes maintenant, elles sont adultes mais ouais, je m’en occupais pas mal. » Pas besoin de détailler ici son histoire personnelle et le fait que son intérêt pour elles s’est mis à diminuer à mesure que son intérêt pour la poudre augmentait. Elles n’ont pas mérité ça, sûrement qu’il le sait au fond de lui. « Elles sont plus jeunes que toi je présume.  » Il hoche la tête, elle devine ça à quoi ? « Yup. J’ai 10 ans d’écart avec la dernière. » Nova ; la petite dernière, elle a forcément une place un peu particulière. Mais c’est aussi celle qui n’est pas venue une seule fois le voir, qui ne lui a pas répondu ni aux lettres ni aux appels. Tout est à reconstruire, et il sait pas vraiment par où commencer. « Et toi, t’as des frères et soeurs ? » qu’il demande alors, participant activement à la conversation, ce qui n’est pas spécialement dans ses habitudes - peut-être qu’il change, finalement.

future in my hands

@Eli cash ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

Après qu’Eli ait sous-entendu que je l’importunais à lui tailler une bavette au lieu de le mettre au boulot, je n’ai su cacher mon enthousiasme et ma joie quand il a changé d’avis. Je n’y étais pas préparée et j’aurais été en droit de décliner l’invitation. néanmoins, il en faut plus que l’étalage discret d’une vérité - je ne suis pas venu là dans le but de discuter - pour me vexer. Loin d’être refroidie, j’ai empaumé l’occasion sous conditions, celles que j’ai émises davantage pour moi que pour lui. Je perds rapidement la notion du temps lorsque je répands autour de moi mon affection pour Lola. Tout comme j’oublie facilement la limite entre ce qui se pose en questions et celles qu’il est préférable de taire. je me suis donc disciplinée pour retenir le “pourquoi” qui me brûle les lèvres. Dans le fond, l’essentiel, c’est qu’il ait changé d’avis, ses raisons ne regardent que lui. Aussi, me suis-je contentée de l’instruire sur celle qui a retenu son attention : Lola. J’en ai aussitôt déduit qu’il aimait les gosses et, par extension, qu’il n’a rien du mauvais bougre décrit la veille par ma mère. la pauvre s’est arrêtée à ses préjugés et, si j’en crois la réaction d’Eli, ils ont la dent dure. ”De la boxe, oui. ça t’étonne ? Pourquoi ? Tu as l’allure pour faire du rugby, mais tu pourrais tout aussi bien pratiquer l’arc à flèches ou … je sais, l’escrime ?” Son effarement dépendrait des diktats de la société que ce serait normal. Mon père vivra mal que sa petite-fille s’échauffe sur un ring. Pour cause, elle n’est qu’une enfant. C’est une activité violente aussi. Et, en tant que petite fille, ses passions doivent se résumer à la danse classique ou à la gymnastique artistique. Je n’ai donc pas réprimé mon rire, frais, amusé, dénué de moqueries. ”Je ne l’ai pas été pour ma part, même si je ne suis pas chaude, je ne vais pas le cacher. Je déteste ce sport. Je ne vois pas quel plaisir on peut prendre à se taper dessus. Mais, ça doit être génétique. Et, je suis personne pour l’interdire de faire ce qui lui plaît.” ai-je déclaré, faisant fi de la mesure au profit de mon émotion. Mon dédain colore ma voix, car à mon sens, le métier de Mickey a contribué à détruire notre mariage. Tout du moins est-ce l’explication qui m’a permis de mieux dormir la nuit. C’était la plus facile, elle me dédouanait de la responsabilité d’avoir échoué, d’avoir manqué de ce “quelque chose” qui aurait empêché sa rechute. ”Mais, non. Elle n’a pas de problème à l’école. Pas que je sache en tout cas. Pas de convocation chez l’instit et elle ne m’a rien dit.” Harlan non plus. Il en aurait été informé : Selim l’aurait rapporté par inquiétude. ”Et non, elle n’est pas bagarreuse, mais son papa était boxeur. Enfin, il l’est toujours.” Différemment. Il est tombé en disgrâce et si je ne doute pas qu’il enfile des gants, les circonstances sont à des kilomètres de la compétition, de cette pression pesant lourd sur ses épaules. ”Elle voudra qu’il soit fier d’elle.” S’il se montre de nouveau, un jour, et ce n’est pas gagné. Mes espoirs se réduisent en peau de chagrin à mesure que le sablier s’égraine. ”Elle va se donner à fond et puis, je t’ai dit, je suis sûre qu’elle a ça dans le sang.” ai-je conclu, soucieuse de m’intéresser à lui, curieuse également. Mais, est-ce utile de le préciser ? ”Tu les vois souvent ? Elles font quoi dans la vie ? Elles sont mariées ? Elles ont des enfants ? ” Dix ans d’écart avec la cadette et je présume que les plus grandes se sont construites une vie tandis que celle de leur frère a été mise entre parenthèses. Il l’a évité, le mot prison et je n’ai pas rebondi. Inutile de le mettre mal à l’aise alors que je suis parvenue, à grands renforts d’efforts, à briser la glace. C’est fragile : je ne le froisserai pas. Lui parler de sa famille est plus approprié. ”Je suis fille unique, mais j’ai été entourée. J’ai grandi avec mes cousin, cousines, dans la même maison. Ce n’est pas qu’une façon de parler.” ai-je confié en l’observant mettre du cash sur les plinthes. ”Tu sais que, si tu n’as pas terminé aujourd’hui, ce n’est pas grave, hein. De toute façon, il faudra quand même tu reviennes après que la première couche ait séché.”
 

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

« De la boxe, oui. ça t’étonne ? Pourquoi ? Tu as l’allure pour faire du rugby, mais tu pourrais tout aussi bien pratiquer l’arc à flèches ou … je sais, l’escrime ? » L’idée vient déclencher un nouveau rire chez l’ancien détenu ; Aliyah réalise sûrement déjà qu’elle fait face à une personne dont les préjugés ont tellement la vie dure qu’elle lui fera difficilement accepter qu’une petite fille haute comme trois pommes soit capable de faire de la boxe ; et que lui soit le genre à tenir un arc dans ses mains, ou pire, un fleuret - non pas qu’il n’en connaisse le terme. « Ouais bah clairement, flingue-moi si tu me vois faire du tir à l'arc un jour. » qu’il rigole alors grassement, témoignant une nouvelle fois de toute cette culture dans laquelle il a baigné, à coup d’hommes très virils et de femmelettes sans défenses, d’hétérosexualité maladive et de différence réprimée ; sûrement que la prison n’a pas amélioré la situation et qu’il s’est un peu plus ancré dans ces notions ridicules qui lui collent aujourd’hui à la peau. Ce n’est cependant pas une bonne raison, ses propres sœurs ont réussi à sortir de ces préjugés, pourquoi pas lui ? Alors au lieu de se lancer dans une explication du pourquoi il trouve l’idée pleine d’humour, il préfère l’écouter ; continuant sa tâche d’une oreille attentive. « mais son papa était boxeur. Enfin, il l’est toujours. » Ceci explique donc cela. « Elle voudra qu’il soit fier d’elle. » « et il le sera, fier d’elle ? » qu’il demande alors. Sûrement que lui aussi, enfant, aurait tout fait pour attirer l’attention d’Aja, pour la rendre fière de lui, pour qu’elle en vienne à poser un regard chaleureux sur le petit garçon qu’il était plutôt que cette haine qui irradiait de tout son être pour lui faire comprendre une chose : il n’était pas le bienvenue, aucun d’eux ne l’étaient et pourtant, les enfants se sont enchaînés, les aînés sont devenus suffisamment grands pour prendre le relai et peu à peu, Eli a repoussé l’idée d’un jour pouvoir être synonyme de fierté aux yeux d’une mère qui n’en avait que faire. « Tu les vois souvent ? Elles font quoi dans la vie ? Elles sont mariées ? Elles ont des enfants ? » Evidemment qu’il n’a pas pu s’empêcher de parler d’elles ; faut dire qu’il est fier de cette fratrie, même s’il est souvent bien incapable de leur montrer, et qu’il a fait plus de conneries qu’autre chose, les abandonnant de trop nombreuses fois pour qu’elles ne puissent aujourd'hui compter sur lui, la prison ayant sûrement été le coup de grâce. Les tonnes de questions le font rire ; mais elles lui font également du bien, c’est pas en prison qu’on lui accordait une quelconque attention et qu’on s’intéressait à lui, ça change. « La plus âgée est venue me voir, oui. Mais c’est la seule, elle est ambulancière. J’crois. » qu’il ajoute, réalisant bien vite qu’il ne s’intéresse si peu à ce qui peut se passer autour de lui qu’il ne peut l’affirmer avec certitude ; le mot prison toujours sous-entendu mais jamais prononcé. « Aucune n’est mariée, aucune n’a d’enfant. Sauf si Evie me l’a pas dit. » Aucune n’ont répondu à ses lettres non plus ; donc impossible pour lui de savoir ce qu’elles sont devenues. « J’ai revu la petite dernière aussi, elle fait des études. » Il a même débarqué directement sur le campus pour la retrouver, la surprenant sûrement plus que de raison puisqu’elle n’était même pas informée de sa sortie. « Je suis fille unique, mais j’ai été entourée. J’ai grandi avec mes cousin, cousines, dans la même maison. Ce n’est pas qu’une façon de parler. » Pour une fois qu’il retourne la question pour s’intéresser à son interlocuteur. « Ah ouais, comment ça se fait ? » qu’il demande alors ; faut dire que ce n’est pas un schéma familial classique, une structure familiale qui fasse partie des familles habituelles. Alors il se pose question, qui sait, ils ont peut être plus en commun qu’il n’y paraît que prime abord ? « Tu sais que, si tu n’as pas terminé aujourd’hui, ce n’est pas grave, hein. De toute façon, il faudra quand même tu reviennes après que la première couche ait séché. » Il hoche la tête mais sans s’arrêter pour autant, il aimerait avancer le plus possible et surtout, récupérer les sous le plus vite possible.

future in my hands

@Eli cash ☆ Aliyah Reeves

gifs by (c) frankeggelhoffer et (c) nothingtolosebutweight

Autant m’a-t-il semblé difficilement abordable lorsqu’il est arrivé, autant je me réjouis de l’entendre rire. Mes familiarités ne l’importune plus et, si je doute d’avoir apprivoisé l’ancien détenu, je me vante d’avoir réussi à briser la glace de peu de choses finalement. Il m’a suffi d’être moi : soucieuse d’autrui et lucide sur ce moment où je deviens gênante. Ouvrir le dialogue sur ma précieuse petite fille aurait aidé, c’est indéniable. Elle est au coeur de notre conversation qui ne dit plus long que des banalités à propos de mon enfant. J’en apprends sur Eli au même titre que si j’avais posé des questions franches. Peut-être même plus, d’ailleurs. Je pense ne pas trop m’avancer en actant qu’il se serait braqué. Sur l’heure, il paraît assez à l’aise pour s’adresser à moi comme si nous ne nous étions pas rencontrés il y a une heure et j’en suis satisfaite. ”Oh, je suppose que te confisquer l’arc ou les flèches sera suffisant mais, promis, je te laisserai pas faire un truc pareil. Même si, en vrai, j’ai entendu dire que c’était très relaxant et que c’était parfait pour apprendre à se canaliser. Peut-être que c’est moi qui devrait en faire, en fait.” ai-je remarqué, ricanant à mon tour. Mon sens de la dérision est édifiant : je ne suis pas susceptible et plutôt bon public à défaut d’être douée d’un humour aiguisé. La fée de la farce m’a boudé. J’ai été préférée par celle de la bonne humeur. Je souris, tout le temps, et à pleines dents… mais la grimace s’affadit dès lors qu’il est question de Mickey et de sa relation avec Lola. ”Oui. Je présume qu’il le sera. Mais, je ne me fais pas d’illusion. C’est avec lui qu’elle voudrait apprendre et ça risque d’être compliqué. Je ne peux donc que supposé à ce stade.” J’ignore où il se trouve, son papa. Il s’est barré en laissant derrière lui une panoplie de questions. Le boxeur a été ma famille et, si notre séparation menaçait son équilibre, je me suis battue pour préserver le lien. Etait-ce inutile ? A quel point ai-je perdu mon temps ? Le moment est mal choisi pour y penser. Aussi, ai-je détourné la conversation vers ceux qui, d’après moi, ont représenté des piliers contre lesquels s’appuyer quand la prison était difficile à encaisser. ”Tu crois ? Seulement ? Tu ne l’as pas vue récemment ou elle a changé de boulot et tu lui as pas posé la question ?” me suis-je étonnée alors que, cette fois, j’ai raté l’opportunité de me taire. ”Tu es resté longtemps là-bas ?” me suis-je enquis, évitant le mot “prison” tel qu’il l’aura fait plus tôt. ”Evie, c’est la plus vieille ? Celle qui est venue te voir donc ? Et la plus jeune ? Que tu as revue, fais des études, donc ?” Compte tenu de l’audace de mon interrogation précédente, j’ai concédé aux confidences le pouvoir de m’absoudre d’une erreur. ”On n’avait pas les moyens de vivre en ville. Mes parents n’avaient pas non plus les moyens de louer une maison et mon oncle et ma tante non plus. Du coup, ben, on s’est rassemblés. Je considère mon cousin comme un grand frère. Tu sais, un du genre chiant qui n’est jamais content, qui est super protecteur et qui parfois devrait s’abstenir. Il n’aimait pas beaucoup mon mari, ça nous a beaucoup éloigné en réalité. Mis, je reste proche de ses soeurs. Je vis avec l’une d’elle d’ailleurs. Je ne suis pas taillée pour la solitude., Mais, je présume que tu l’avais compris.” Et lui ? L’aime-t-il ? A l’inverse, la prison, outre les conséquence de la privation de liberté, a dû ressembler de trop près à un véritable enfer. Somme toute, une curiosité insolente à la fois. Le reste pour plus tard si, d’aventures, il ne s’offusquait pas auquel cas je m’excuserai platement. 

future in my hands

 @Aliyah Reeves ☆ Eli Cash

gifs by (c) harley, katesgifsrp & pinterest

septembre / 2024
appartement d'Aliyah

Eli ne s’était pas attendu à ce qu’il se lance dans une véritable conversation avec la personne prête à lui donner un job aujourd’hui ; est-ce que ça témoigne d’une solitude plus importante qu’il n’aurait pu l’imaginer ? Il n’ira pas creuser plus loin, pas le genre à se soucier des états d’âmes même quand ces dernières le concernent directement. Il l’écoute alors, se fait forcément sa propre idée de l’histoire avec ce qu’il peut lire entre les lignes ; il ne s’imagine pas que le père est complètement absent de la vie de cette petite fille, préfère imaginer une autre histoire, quelque chose de plus joyeux pour l’enfant que Lola doit être.

Les questions se tournent vers lui et sa famille et la honte pourrait presque le gagner - presque. Il décide même de ne pas répondre aux premières questions d’Aliyah, se rendant bien compte que le fait qu’il ne soit sûr de rien quant au métier de sa jeune soeur prouve suffisamment de choses sur lui ; cela fait bien des années qu’il ne prend plus le temps de s’intéresser complètement à elles et même s’il a désormais l’intention de faire de son mieux pour changer la tendance, il ne se voile pas la face quant au fait que le chemin sera long et compliqué, s’il arrive un jour à retrouver sa place de frère, ce qui n’est pas spécialement donné à l’heure actuelle quand on sait que certaines de ses soeurs ne lui parlent même plus. Et aussi surprenant que ça puisse paraître, il préfère actuellement répondre aux questions concernant son incarcération que d’avouer à voix haute à quel point il a pu être un mauvais frère - même si ça s’entend forcément. « J’ai fait 5 ans. » qu’il explique alors sans gêne. « J’ai encore 2 ans avec un bracelet et après c’est fini pour de vrai. » Sous conditions qu’il ne fasse pas une autre connerie entre temps, cela va sans dire. Il est surpris qu’Aliyah enchaîne les questions, qu’elle puisse s’intéresser et l’écouter réellement ; faut dire qu’il n’a pas grandi dans un tel environnement et que ses années d’adulte jusque-là ne l’ont pas aidé à réaliser que certaines personnes pouvaient en avoir quelque chose à foutre d’un délinquant. Il ne sait pas trop définir si ça témoigne d’une gentillesse évidente ou d’une naïveté implacable - sûrement que l’avenir le dira. « Ouaip, Evie c’est la plus vieille. On a juste 1 an d’écart donc j’ai pas de souvenirs de quand elle était pas là. » Et tant mieux, sûrement. « Elle est venue me chercher à ma sortie. Nova c’est la plus jeune, elle est à  la fac ouais mais elle fait guide des lieux hantés aussi. » ça il s’en souvient suffisamment tant ça l’a surpris et amusé ; au fond, il n’est pas surpris de trouver Nova dans ce genre de job mais ça vaut le coup de le mentionner.

Il écoute Aliyah, hoche la tête à ses mots quand elle parle de l’attitude de son cousin ; sûrement que lui aussi était comme ça quand ils étaient plus jeunes, surprotecteur et plutôt chiant, il aurait pu rester ainsi mais l’histoire ne s’est pas écrite de cette façon. Il pose une autre question, et la discussion continue ainsi quelques minutes, les deux échangeant sur leurs vies sans conséquence - après tout, ils n’auront sûrement qu’à se rencontrer quelques fois avant que la mission ne soit terminée. Quand Aliyah n’a plus le choix que de retourner en cuisine, Eli se lance dans la peinture et y passera quelques heures en silence, chantonnant quelques airs de musique et se perdant dans ses pensées - ce n’est pas parfait, mais il y met du sien, et c’est finalement tout ce qu’on lui demande.

FIN