the end of a chapter (evie & eli)

the end of a chapter

@Evanna Cash  ☆ Eli Cash

gifs by (c) pinterest

août / 2024
devant la prison de Bristol

Le bout de papier contenant le numéro de Samuel dans une main, son maigre sac sur l’épaule ; Eli sent encore son coeur battre fort contre sa poitrine alors qu’il est bien incapable de faire sens des dernières minutes qui viennent de s’écouler, le fantôme des lèvres de son conseiller encore un peu trop présent contre les siennes. Ses jambes le portent mécaniquement mais son esprit est encore derrière lui - et quand il se retourne pour s’assurer que la scène est bien réelle, son regard ne se pose que sur les briques où tous deux se trouvaient quelques instants auparavant - un moment suspendu dans les airs, un moment irréel.

C’est perdu dans ses pensées qu’il arrive jusqu’à la voiture arrêtée de l’autre côté de la chaussée, sur ces fameuses places dépose-minute qui sont en réalité des “récupère-minute” ; et tant mieux, Eli n’a aucunement l’intention d’être laissé ici une seconde de plus - enfin, quoi que ? Il se retourne une nouvelle fois, comme pour tenter de l’apercevoir, espérant quelque chose sans trop savoir quoi. Il est parti, évidemment mais la main d’Eli se resserre sur le bout de papier et alors qu’il lève les yeux et tombe le regard sur Evanna, il s’empresse de fourrer le numéro bien au fond de sa poche de jogging. Il y pensera plus tard.

C’est étrange de trouver Evie changée étant donné qu’il l’a vue de façon régulière au parloir, et pourtant, il ne peut que la trouver différente. La lumière du soleil qui tombe sur elle plutôt que les néons grésillants peut-être ; ou serait-ce le filtre de la liberté qui laisse beaucoup trop de possibilités à Eli maintenant qu’il est enfin dehors ? Il est soulagé de la voir, même s’il ne lui avouera pas - il faut dire qu’il n’était pas certain qu’elle se pointe, devinant sa colère, sa peine et sa déception à chaque échange qu’ils ont pu avoir les cinq dernières années. Putain, les quinze dernières années même. « Salut Ev, ça va ? » qu’il demande quand il arrive à sa hauteur, une question comme si tout était normal - car Eli ne sait pas gérer la situation, ne sait pas ce qu’il doit dire ou faire et faut dire que toutes les idées qu’il a pu cogiter durant la nuit se sont rapidement envolées en un baiser. « T’es venue toute seule ? » qu’il demande en jetant un coup d'œil vers la voiture, tentant d’apercevoir si une de ses sœurs se cacherait dans l’habitacle. Il pourrait - il devrait - la remercier, mais ces mots n’ont jamais été le fort d’Eli ; aussi, il n’est même pas sûr de savoir les prononcer. « On irait pas manger un bout ? Je meurs de faim. » Comptez sur Eli pour éviter l’éléphant au milieu de la pièce, il fuit une quelconque discussion et fuit au passage le regard de sa sœur - et toutes les émotions qui risqueraient de s’en dégager et de déborder un peu trop sur lui.

THE END OF A CHAPTER

@Eli Cash ☆ Evanna Cash

gifs by (c) arisgifpacks et (c) harleygifstock2

août / 2024
devant la prison de Bristol

Voilà 5 ans qu'elle voit son frère dans l'enceinte de ce bâtiment lugubre et très peu accueillant. Personne n'a envie d'y mettre les pieds, et c'est bien l'objectif, mais Evie n'a pas eu vraiment le choix. Elle n'a jamais rien fait pour se retrouver dans un tel endroit, mais on ne peut pas en dire autant de son frère. Elle l'aime presque autant qu'elle le déteste. C'est faux, elle l'aime beaucoup plus mais elle sait qu'en lui donnant autant d'importance, elle lui laisse la possibilité de lui faire du mal et pour ça elle s'en veut et elle lui en veut aussi. Mais, c'est Eli. Son grand frère et elle lui trouvera (presque) toujours des excuses. Et des excuses il en a beaucoup, des réelles et des moins réelles mais il n'a jamais demandé à vivre ce qu'il a du vivre. Ce n'est pas une excuse, Evie a vécu la même chose et elle n'a pas décidé de blesser toute sa famille, de sombrer dans la délinquance et de finir ici dans cette prison, obligeant ses sœurs à accepter de vivre sans elle pendant 5 ans. C'est ce sentiment d'abandon qu'elle a ressenti, encore, quand il a été condamné qu'elle vit mal, très mal. Et le fait aussi de le savoir au milieu de tous ces criminels et délinquants qui n'ont rien à voir avec le Eli qu'elle connait. Ou plutôt le Eli qu'elle veut voir. Elle l'aime son frère, mais elle ne sait pas s'il sait aimer. Elle ne le blâme pas, elle lui en veut, mais lui pardonne toujours tout parce que c'est lui. Et aujourd'hui, c'est le cœur à la fois lourd et léger qu'elle attends devant la prison. Il sort enfin et elle a attendu ce jour depuis l'annonce de la condamnation et pourtant la boule au ventre est réelle. Eli sort, Eli va retrouver la vie réelle et on ne peut pas dire que ça lui ait vraiment réussi jusqu'à maintenant et voilà que ses inquiétudes reviennent de plus belles. Pas qu'elle ne s'inquiétait pas pour lui quand il était en prison, mais elle n'avait aucun moyen d'intervenir, de gérer la sécurité de son frère la bas. Mais, il sort et les raisons qui l'ont poussé à se tourner vers les métiers du secourisme, reviennent de plus belles entraver ses pensées et raviver des peurs qu'elle a en elle. Son cerveau a été témoin de violence depuis son plus jeune âge. Il est programmé pour voir la violence, pour l'imaginer, pour la craindre aussi. Elle a retrouvé plusieurs fois sa mère allongée sur le sol, le sang coulant sur son visage. Elle a cru plusieurs fois que sa mère allait mourir sur le sol de leur minuscule cuisine, et dès qu'elle a apprit pour les fréquentations et les habitudes de son frère, elle s'est mise à craindre le pire pour lui. L'imaginant plus d'une fois, allongé dans une ruelle, seul en train de faire une overdose. Son cerveau s'est construit sur ça et si elle le travaille en thérapie, ses pensées viennent bien trop souvent entraver sa capacité à réfléchir sereinement. Alors quand elle voit Eli avancer vers sa voiture, enfin libre, ce n'est pas vraiment un soulagement pur qu'elle ressent. Pourtant, elle est heureuse de le voir marcher librement, mais elle sait que ce retour à la vie réelle risque d'être difficile pour Eli, et pour elle parce qu'elle ne va pas pouvoir s'empêcher de vouloir le protéger. Sauf qu'elle ne peut pas protéger Eli de lui même, et c'est sans doute ça le plus grand danger de son frère. Elle l'attends contre sa voiture et quand il arrive à sa hauteur, elle est soulagée de porter ses lunettes de soleil pour qu'il ne puisse pas voir l'émotion dans ses yeux. Non, elle ne pleure pas, mais elle a envie de le prendre dans ses bras autant qu'elle a envie de le taper, et c'est beaucoup d'émotions à gérer. « Salut Ev, ça va ? » C'est avec un sourire contenu qu'elle lui réponds, luttant contre son besoin de le prendre dans ses bras mais il a décidé de faire comme si tout était normal aujourd'hui, comme si ce n'était pas des retrouvailles émouvantes et elle tente de garder le cap qu'il a décidé. « Ca va, c'est surtout à toi qu'il faut demander ça ? Ca fait quoi d'être libre ? » Elle n'a pas oublié ces 5 dernières années, elle n'a pas oublié le comportement d'Eli avant même la prison, mais aujourd'hui est son premier jour hors de la prison et elle n'a pas envie de risquer de le voir fuir. Il le fera mais elle veut quelques heures avec lui avant alors elle remballe sa colère, ses peurs, ses émotions, ses reproches et sa déception parce qu'il a sans doute attendu ce jour depuis 5 ans. « T’es venue toute seule ? » Elle secoue la tête. C'est autant par instinct de protection pour ses sœurs, qu'un peu égoïstement qu'elle n'a pas proposé à l'une de leurs sœurs de venir aujourd'hui. Elle sait la douleur que ce fut pour toutes de savoir Eli derrière des barreaux et avant de laisser ses sœurs retrouver Eli, elle a besoin de voir comment il va, comment il est. « Oui, je me suis dis que ça ferait peut-être beaucoup à gérer pour aujourd'hui. Tu vas devoir te contenter de moi, à part si tu as autre chose de prévue ? » Elle espère qu'il n'a pas eu besoin d'elle que pour faire le taxi et qu'il lui a réservé quelques heures dans cette journée mais elle acceptera ce qu'il est prêt à lui laisser. Elle a comprit que ça fonctionne comme ça avec Eli. « On irait pas manger un bout ? Je meurs de faim. » A nouveau elle secoue la tête. Elle a pleins de choses à lui dire, pleins de questions à lui poser, pleins de pensées à lui partager, mais elle ne le fait pas parce qu'elle sait que ce n'est pas le jour, et elle sait aussi que ça risque de ne jamais l'être avec Eli, mais elle s'adapte parce qu'elle n'a pas d'autres choix. « Je te laisse choisir ce qui te fait envie, je doute que tu as déjà réfléchis à tout ce que tu voulais faire, voir et manger pour aujourd'hui ? » Elle n'en sait rien finalement, mais elle imagine parce qu'il a attendu 5 ans pour ça. Elle se détourne de lui pour rejoindre sa voiture et l'invite à entrer dans sa voiture. Et ce n'est qu'une fois le moteur allumé et la voiture en marche, le regard concentrée sur la route, qu'elle lui dit ces quelques mots qu'elle a sur le bout des lèvres depuis de longues minutes. « Tu m'as vraiment manqué, je ne supporterais pas que tu te retrouves une seconde fois la dedans. » Elle ne le regarde pas, les yeux rivés sur la route, cachés par ses lunettes de soleil, elle a pourtant la voix qui tremble. Elle voudrait lui demander de promettre qu'il ne referra pas de conneries, mais elle sait qu'elle ne supportera pas une autre promesse rompue, et Eli n'est pas capable de lui promettre ce genre de chose, alors elle ne dit rien et allume le poste comme si cette discussion n'était finalement pas si importante.

the end of a chapter

@Evanna Cash  ☆ Eli Cash

gifs by (c) pinterest

août / 2024
devant la prison de Bristol

Il est dehors, et c’est aussi exaltant que c’est étrange ; mais ce ne sont que les premières minutes, bien sûr qu’il ne peut pas s’attendre à vivre cette sortie comme quelque chose de naturel, il lui faudra du temps. Il a déjà entendu tout le blabla, et le programme de réinsertion dans lequel il est lui permet de savoir un peu où il met les pieds; il connaît la chanson. La sortie peut-être difficile, vous vous sentirez perdu, vous risquez de mal dormir pendant quelques semaines, voire quelques mois - et puis, il y a tout le reste, vous devrez trouver un travail, ne restez pas inactif, c’est le meilleur moyen de replonger et vous ne voulez pas replonger. Il entend d’ici les phrases de la vidéo qu’on leur sert plusieurs fois avant qu’ils ne puissent enfin mettre les pieds dehors. Et puis y’a les paroles du conseiller en lui-même mais ce terrain, difficile d’y aller quand il ne peut qu’avoir une pensée pour les quelques minutes auparavant, ce moment suspendu qu’il n’est même plus certain d’avoir vécu pour de vrai - c’était peut-être un mirage ?

Sa sœur, en revanche, ne semble pas être le fruit de son imagination et il laisse défiler dans sa tête toutes les possibilités de retrouvailles qu’il avait imaginées ; en partageant certaines à son camarade de chambre et le laissant se foutre ouvertement de sa gueule. Il faut dire qu’il avait pensé à pas mal de choses : qu’elle ne vienne pas, déjà, et il est rassuré de constater que cette prédiction ne s’est pas réalisée. Il avait imaginé une scène digne des films les plus ridicules de la toile, se voyant sauter au cou d’une Evanna en larmes, s’agrippant l’un à l’autre en se promettant plus jamais. Qui sait, elle en rêvait peut-être mais lui a passé une bonne dizaine de minutes à essuyer les larmes qui coulaient sur ses joues à force d’en rire - non, ce n’est pas son genre. Son genre à lui, visiblement, c’est plutôt de faire mine de rien et d’agir comme si les cinq dernières années n’avaient pas existé - il sait très bien ce qu’elle en pense et il peut sentir le reproche d’ici, pas besoin de se lancer immédiatement dans le vif du sujet, il ne souhaite pas gâcher le souvenir pour le moment si beau de cette sortie anticipée. « Ca va, c'est surtout à toi qu'il faut demander ça ? Ca fait quoi d'être libre ? » Ses épaules retombent et il prend enfin la mesure de ce qu’il est en train de vivre ; il est libre - ou presque ! - et alors que son regard se pose un peu sur les immeubles autour de lui, ceux qui font face à la prison qu’il refuse de regarder pour le moment, il peut répondre. « ça fait bizarre. » qu’il avoue très sincèrement avant d’ajouter dans un souffle. « ça fait du bien. » Y’a pas grand chose de plus à dire, ça fait du bien mais il ne peut pas encore mesurer ce que tout cela implique, chaque chose en son temps ; déjà, il doit partir d’ici. « Je te laisse choisir ce qui te fait envie, je doute que tu as déjà réfléchis à tout ce que tu voulais faire, voir et manger pour aujourd'hui ? » La vérité, c’est que ça fait des mois qu’il réfléchit à ce jour et que finalement, maintenant qu’il y est, il ne sait plus vraiment par où commencer. Pour le moment, il veut manger, c’est la seule chose à laquelle il pense sans aucun doute. « J’aimerais bien un bon burger. » qu’il avoue alors. « Tu connais une bonne adresse ? Pas un truc fastfood à la con, un vrai truc bien gras, bien bon. J’pourrais tuer pour ça, là tout de suite. » Il rigole, s’installe en même temps dans la voiture, balançant son sac sur la banquette arrière.

Alors que la voiture se lance, Eli ne pipe mot. Le visage presque collé à la fenêtre, il observe la ville qui l’a vu grandir et observe les changements. Il reconnaît, bien sûr, tout autant qu’il peut remarquer les changements. C’est Bristol, une nouvelle Bristol - une meilleure peut-être ? « Tu m'as vraiment manqué, je ne supporterais pas que tu te retrouves une seconde fois la dedans. » Il laisse quelques secondes de silence s’écouler alors qu’il laisse le poids des mots venir l’écraser. Il savait qu’elle lui lancerait quelque chose tôt ou tard, et il ne peut pas lui en vouloir - au contraire, il la trouve plutôt mesurée comparé au tourment qui est très certainement le sien. Il la connaît suffisamment pour savoir qu’elle se retient, que ce qu’elle pense ne transparaît pas encore. Elle allume la radio, lui offre une porte de sortie qu’il décide de ne pas prendre. « Je sais. » qu’il se contente de répondre, pas capable d’avouer ses sentiments les plus profonds en lui répondant qu’elle lui a manqué aussi - la vérité pourtant -, et pas capable non plus de faire une énième promesse qu’il ne tiendra pas. Il a entendu les statistiques, il sait que les chances ne sont pas en sa faveur. « Et les petites, ça va ? » qu’il demande en éteignant le poste, prenant cette liberté et expliquant par ce geste qu’il est prêt à discuter - mais pas de tout. Si les petites ont bien grandi, il garde ce réflexe d’utiliser ce terme, elles seront toujours les petites pour lui et les cinq ans qu’il a passé enfermé à ne pas les voir grandir ne vient pas aider.

Il recolle le nez contre la vitre, refusant de perdre ne serait-ce qu’une miette du paysage de Bristol qui défile devant ses yeux. « T’habites où maintenant ? » qu’il demande en voyant quelques immeubles passer ; il aurait pu lui demander de l’héberger mais il ne l’a pas fait, n’aurait sûrement pas supporté le regard de sa cadette sur lui - ce regard empli de déception et de regrets et d’attentes. Non, il en aurait été incapable. « Tu vis seule ? » Y’a tellement de choses qu’il ne sait pas, tellement d’informations qui lui sont totalement inconnues et un trajet en voiture ne lui apportera pas toutes les réponses mais ça peut être le début ; et c’est mieux que de parler de ses anciens déboires à lui. « Aja est au courant que je sors ? » Ils parlent rarement d’elle ; et pourtant, il ne peut s’empêcher de poser la question, laissant suspendre également une autre question - ou un millier. Est-ce que tu lui parles ? Est-ce qu’elle est vivante ? Et David ? De toute façon, toute question qui ne le concerne pas directement est mieux que l’avalanche de sentiments que Evie pourrait lui balancer s’ils se rendaient ensemble sur un terrain glissant - et il entend à sa voix qu’il vaut mieux pour lui qu’il s’en échappe le plus possible.

THE END OF A CHAPTER

@Eli Cash ☆ Evanna Cash

gifs by (c) arisgifpacks et (c) harleygifstock2

août / 2024
devant la prison de Bristol

5 ans. Ce n'est pas la première fois qu'ils sont séparés. Leur enfance aurait du les préparer à ça, et pourtant ces cinq dernières années privées de son frère, n'ont pas été aisée pour Evie. Mais elle n'a pas le droit de s'en plaindre, elle était libre, lui non. Il était enfermé entre quatre murs pendant qu'elle vivait sa vie, sans lui. Elle aurait pu continuer ainsi. Continuer sa vie sans lui, mais elle ne peut pas. Eli c'est son frère, une partie d'elle, ils sont pourtant tellement différents, mais Eli a toujours été si important dans la vie d'Evanna. Il était le seul qui pouvait la comprendre, le seul à qui elle voulait parler, le seul auprès duquel elle se sentait presque en sécurité. Les adultes les ont séparé, puis Eli s'est barré. Une fois, deux fois, des dizaines de fois, avant de finir ici et n'avoir plus de possibilité de fuir et pourtant cet abandon fut sans doute le plus dur à gérer pour Evanna. Il lui a fait du mal, inconsciemment sans doute, mais si elle a apprit à se protéger, à peine, elle n'a jamais su le faire d'Eli, parce qu'elle n'a jamais voulu le faire. Et aujourd'hui, elle est la première à vouloir profiter de cette liberté retrouvée pour Eli. La première à vouloir passer du temps avec lui alors qu'ils ont tant à rattraper, 5 ans, qu'ils ne pourront jamais récupérer.  « ça fait bizarre. ça fait du bien. »  Elle ne sait pas ce qu'il se passe dans la tête d'Eli, elle ne pourra sans doute jamais le savoir, c'est un mystère qu'elle a tenté de resoudre sans y parvenir et ce n'est pas après ces cinq années de prison qu'Eli risque d'être plus facilement accessible. « Ca fait du bien de te voir. » Elle le souffle doucement, comme si l'avouer risquait de venir perturber ce moment. Pourtant, elle en ressent des choses, un tas de choses alors qu'elle le voit enfin libre, et non dans cette prison qu'Evie ne veut plus jamais revoir. Les retrouvailles se font dans la retenue, pas parce qu'Evie le désire, mais elle connait son frère et elle sait que si les câlins avec Nova sont courants, ils le sont clairement pas avec Eli pourtant elle aurait tellement besoin de le serrer dans ses bras. De le retrouver vraiment, de lui dire tout ce qu'elle a sur le cœur mais la distance n'est pas que physique entre eux. Peu à peu, les années ont amené aussi les deux à se protéger et pourtant l'amour qu'Evie ressent pour son frère, n'a pas faibli mais elle ne sait plus vraiment comment lui dire. « J’aimerais bien un bon burger. Tu connais une bonne adresse ? Pas un truc fastfood à la con, un vrai truc bien gras, bien bon. J’pourrais tuer pour ça, là tout de suite. »  Il rit Eli, et ça fait du bien d'entendre son rire, faut dire que la prison ne permettait pas vraiment d'avoir beaucoup de moments de fou rire. « Je connais ça, une fois que tu auras gouté leur burger, tu ne pourras plus t'en passer, tu verras c'est une tuerie. »  Elle reprends le champ lexical employé par Eli, il pourrait tuer pour un burger, et elle espère qu'il n'aura jamais à le faire, ni pour un burger, ni pour aucune autre raison, mais elle ne peut decemment pas lui demander ça, là maintenant.

Elle attends qu'ils soient tous les deux installés dans la voiture, sans doute inconsciemment, elle a attendu le moment ou Eli ne pourrait pas la fuir pour dévoiler un peu son émotion et ses pensées. La peur de le voir partir, disparaître, l'abandonner est si forte, qu'elle a attendu que la voiture roule pour ça. Il ne sautera pas d'une voiture en mouvement pour éviter une discussion quand même ? Mais Evie a tellement l'habitude, qu'inconsciemment, elle allume le poste comme pour éviter le silence que va laisser Eli. Elle le sait, elle s'y attends et pour éviter de subir ce silence, elle a besoin de le combler. « Je sais. »  Le silence ne s'installe pas, au contraire même, il le brise. Deux mots, ça peut sembler rien, et pourtant c'est beaucoup. Il sait, il a conscience de ce que son emprisonnement a fait subir à ses sœurs, à Evie. Il sait, et si ce n'est sans doute pas assez, pour le moment ça suffit à Evanna. « Et les petites, ça va ? » La question est posée, le poste est coupé et Eli se montre prêt à discuter, ce à quoi Evanna ne tarde pas à réagir. « Tu sais qu'elles risquent de détester si tu les appelles comme ça. Elles ont pris leur indépendance, et même Nova maintenant est une adulte tu sais. » Elle n'était pas encore majeure quand Eli a été jugé et enfermé. 17 ans, aujourd'hui 22 ans, et c'est peut-être au travers de cette plus jeune sœur que le temps passé est le plus facilement détectable et remarquable. « Mais elles vont bien, si tu veux j'ai des photos dans mon téléphone. » Elle commence à manipuler son téléphone, une mauvaise habitude prise alors qu'elle conduit. Une habitude vraiment dangereuse et très idiote, encore plus pour elle qui voit plusieurs fois par semaines les conséquences de l'utilisation des téléphones au volant. Mais, elle ne fait que le dévérouiller et ouvrir ses photos pour passer son téléphone à Eli, ce n'est pas si grave non ? C'est ce qu'elle se dit en tout cas.

« T’habites où maintenant ? » Elle a quitté son appartement dans lequel Eli avait déjà pu venir squatter. La vie passe, cinq ans, c'est à la fois court et long en fonction de sa condition mais la vie d'Evie a bien changé depuis cinq ans. Tout s'est arrêté pour Eli, mais la vie a continué pour le reste du monde et pour Evie aussi. « J'habite dans le centre, près de la caserne pour être proche du boulot. J'ai une chambre d'amie si un jour tu as besoin. » La dernière cohabitation n'a pas été des plus positive pour les deux, mais Evie ne pourra jamais se résoudre à laisser son frère à la rue, même si la confiance a été rompu, même si la peur de découvrir la chambre vide tout les matins et de ne pas le revoir rentrer sera sans doute insoutenable au quotidien pour Evie, mais s'il a besoin, il y a un lit pour lui et c'est ce qu'elle lui dit sans vraiment le dire. « Tu vis seule ? » Si Eli a râté un tas d'information dans la vie de sa sœur, sur ce détail, il n'a rien râté au moins. Oui, elle vit seule, comme il y a cinq ans. Il y a bien eu des hommes mais aucun de sérieux, rien à partager avec son frère. « Oui oui, je crois que l'amour c'est pas pour nous. » Nous signifiant les Cash. Faut dire que l'amour, ils n'ont jamais connu ça. Des pères absents, disparus dans la nature, une mère incapable d'aimer, Evie a toutes les raisons du monde de ne pas savoir aimer. Et Eli devrait pouvoir la comprendre la dessus. « Et toi tu vas vivre ou ? » Il ne lui a pas demandé d'aide, elle en déduit qu'il a trouvé une solution, sinon jamais il n'aurait obtenu sa libération non ? Pourtant, elle ne sait pas les projets de son frère, faut dire qu'il n'a jamais été très friands de les partager avec Evie et pour cause, il savait très bien, qu'elle n'aurait pas toléré un tier de ses projets. « Aja est au courant que je sors ? » En entendant le prénom de leur mère, Evie détourne son regard de la route quelques secondes pour regarder Eli. Elle ne parle pas d'Aja, jamais. Elle ne parle plus à Aja, et elle est surprise qu'Eli souhaite en parler mais il le fait et elle lui doit une réponse non ? « Je sais pas, je ne lui ai pas parlé depuis des années. Elle n'a pas cherché à le faire non plus, pas avec moi en tout cas, et toi? On l'a obligé pendant des années à voir sa mère, en visite, pour maintenir le lien avec sa mère, mais Evie n'en a jamais eu envie, ou plutôt elle aurait aimé avoir un lien à maintenir avec cette femme mais ça n'a jamais été le cas. Et, le jour ou elle a finit par en prendre conscience, chaque visite devenait une torture de plus dans une adolescence déjà détruite par cette femme. La majorité est venue sceller le destin de cette relation mère/fille qui n'a finalement jamais vraiment existé. « Tu comptes la revoir ? » Peut-être qu'Eli en a besoin et dans ce cas, elle sera là pour lui, pour le soutenir mais pour elle, le passé est un sujet qu'elle essaye le moins possible de déterrer parce qu'ils sont encore trop présents dans ses cauchemars pour qu'ils le soient aussi dans son quotidien. « Je n'ai pas prévenu les filles encore, je voulais te voir avant et voir comment tu allais. Je fais ce que je peux pour les protéger, je veux pas que tu. » Elle ne termine pas sa phrase de peur de blesser Eli mais elle espère qu'il comprendra le message. « Enfin fais attention à elles. » Elle aime son frère, peut-être plus que personne d'autres, mais elle ne le laissera pas blesser leurs petites sœurs et elle espère ne pas avoir à les protéger de lui, elle peut s'inquiéter pour Eli, elle peut le laisser la décevoir, la blesser, l'abandonner encore, elle le laissera faire tout ça mais elle ne le laissera pas blesser l'une de leurs sœurs parce que c'est son rôle aujourd'hui de protéger les filles de la famille Cash. Personne ne l'a jamais fais, mais Evie s'est donné ce rôle, un rôle sans doute bien trop grand pour elle, mais elle donnerait tout pour eux. Pour leurs sœurs et pour Eli.

the end of a chapter

@Evanna Cash  ☆ Eli Cash

gifs by (c) pinterest

août / 2024
devant la prison de Bristol

« Ca fait du bien de te voir. » Il ne la regarde pas, supportant difficilement ce genre d’aveu que lui ne renverra pas. Il n’est pas capable de laisser pendre son coeur entre eux comme elle le fait, pas capable d’avouer ses sentiments les plus profonds ; même pas sûr de les ressentir réellement. Est-ce qu’il est content de la voir ? Oui, sûrement, il y a de fortes chances. Est-ce qu’il en est sûr et certain ? Non, impossible. Alors il fait ce que n’importe qui ferait dans sa situation - ou pas du tout -, il fuit le sujet en réclamant à manger et même dans ses pensées, ce repas tant espéré vient prendre beaucoup de place.

Il est coincé dans la voiture, et il se rend bien vite compte que ce n’est pas la situation idéale ; ici, pas possible de fuir tout ce que sa soeur pourrait lui balancer et alors qu’elle ouvre les échanges pendant que lui observe l’extérieur, il réalise bien la position dans laquelle il se trouve désormais. Mais elle lui offre une porte de sortie avec la musique qui émane du poste de radio et aussi surprenant que ça puisse être, il décide de ne pas s’en saisir et se contente alors d’appuyer sur le bouton off. Cinq ans qu’il attend ce moment, il n’a pas spécialement envie de le laisser filer, bien au contraire. Et si la situation devient trop compliquée, si les mots et les accusations sont trop lourds à porter, alors il n’aura qu’à rallumer le poste, c’est aussi simple que ça. Bien vite, il pose des questions, souhaitant éviter ce qu’elle pourrait vouloir lancer sur la table, il ne sait pas trop sur quel pied elle danse le concernant et il n’a pas spécialement envie de le découvrir là tout de suite ; tout autant qu’il veut en apprendre plus sur tout ce qu’il a pu rater. « Tu sais qu'elles risquent de détester si tu les appelles comme ça. Elles ont pris leur indépendance, et même Nova maintenant est une adulte tu sais. » Il veut bien la croire, même si c’est difficile à imaginer. Il n’a aucune idée de la jeune femme qu’elle a pu devenir, ne sait absolument pas à quoi elle ressemble aujourd’hui et c’est assez effrayant de réaliser une telle chose. Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même, il le sait bien mais une part de lui en veut à sa petite sœur de n’avoir jamais essayé de venir le voir. « Mais elles vont bien, si tu veux j'ai des photos dans mon téléphone. » Il n’est pas le genre à faire une remarque sur la conduite d’Evie ; lui n’ayant pas le permis ne se permettrait pas d’évoquer le danger auquel elle s’expose, ça ne lui passe même pas par l’esprit, habitué à ce genre de comportement de leurs parents. Alors il récupère le téléphone sans un mot et passe quelques longues secondes à passer de photo en photo, à zoomer pour observer le moindre changement sur le visage de celles qu’il aime encore appeler les petites. Nova, qu’il n’a pas vu depuis cinq ans, a changé mais son visage reste enfantin et il la reconnaît bien. Sentant une certaine émotion le gagner, il verrouille le téléphone et le laisse tomber dans le vide-poche, enchaînant directement avec une question alors qu’il ne souhaite pas parler de ce qui a pu l’émouvoir un court instant.

La conversation se fait fluide ; Eli apprend qu’il va vivre dans le même quartier que sa soeur mais il préfère ne pas rebondir pour le moment, ça pourrait lui donner des idées. « Oui oui, je crois que l'amour c'est pas pour nous. » Il sait très bien ce qu’elle veut dire, et elle n’a pas tort. « En même temps, v’là le modèle qu’on a eu aussi. » Et pourtant Eli, il aimerait y croire ; il aimerait laisser son coeur battre un peu plus fort, même si c’est pour se retrouver piétiné quelques temps après. La musique monte à ses oreilles alors qu’il repense à ce baiser avant de se pincer pour sortir de cette imagination. « Et toi tu vas vivre ou ? » C’est la question à 1 million et il sait qu’il pourrait lui mentir pour ne pas avoir à supporter le regard plein de reproches, d’inquiétudes et de questions qui risque de se poser sur lui une fois qu’elle saura. Mais elle va devoir l’y amener, et la situation sera pire si elle l’apprend une prochaine fois, de la bouche de quelqu’un d’autre. Puis, il vient de sortir, il est censé être un autre homme. Et puis de toute façon, ça a été validé par son CPIP, alors bon, y’a rien à craindre. « J’vais aller chez Joseph. Il est sorti y’a pas longtemps. » Joseph, c’est celui qui a été là pour lui quand il en avait besoin, celui qui lui a tendu la main et l’a soutenu, c’est celui qu’il considère comme un frère. Mais d’un autre point de vue, c’est celui qui l’a fait tomber dans le deal de drogue, et dans cette petite organisation qu’on peut apparenter à un mini-gang si on creuse un peu, c’est celui avec qui il a fait de la taule et sniffé quelques rails. Y’a différents points de vue et la seule raison pour laquelle Samuel a accepté ce logement est une raison plutôt secrète.

Les questions s’enchaînent et très franchement, il en a des tonnes ; il a tellement de choses à rattraper. Il se surprend lui-même à parler d’Aja mais il veut savoir où en sont ses soeurs sur le sujet, il veut savoir s’il doit s’attendre à la voir débarquer quelque part. Avec elle, on ne sait jamais. « Je sais pas, je ne lui ai pas parlé depuis des années. Elle n'a pas cherché à le faire non plus, pas avec moi en tout cas, et toi? » Il secoue la tête en guise de réponse, il a bien écrit quelques lettres et autres mots d’insultes mais elles sont toutes dans son sac ; de toute façon il n’avait même pas d’adresse pour les lui envoyer. Dans son sac, y’a aussi des lettres pour Evie mais ça, ça restera un secret de plus. « Tu comptes la revoir ? » Il a eu le temps de se poser la question quand il était enfermé et la réponse est très simple et très claire. « Même pas en rêve. » Il irait peut-être à son enterrement pour danser sur sa tombe - ou pisser dessus, ou les deux. Mais de son vivant, non, il a dit ce qu’il avait à dire. « Je n'ai pas prévenu les filles encore, je voulais te voir avant et voir comment tu allais. Je fais ce que je peux pour les protéger, je veux pas que tu. » Et les voilà, les mots accusateurs qu’il attendait. Il savait bien que ça finirait par arriver et son regard qui se concentrait un peu plus sur sa sœur retourne se poser sur l’extérieur alors que sa mâchoire se serre. Que répondre à ça ? « Enfin fais attention à elles. » « T’as pas besoin de me le dire. » qu’il répond un peu sèchement, incapable de s’en empêcher alors que ça le pique à vif. Pourtant, elle n’a pas tort mais il refuse de l’accepter, refuse d’entendre dans la voix d’Evie combien il a pu leur faire du mal. Il ne la regarde plus, appuie sur le bouton de la radio et remet la musique.

THE END OF A CHAPTER

@Eli Cash ☆ Evanna Cash

gifs by (c) arisgifpacks et (c) harleygifstock2

août / 2024
devant la prison de Bristol
Avoir Eli à ses côtés dans sa voiture, elle a attendu ce moment depuis très longtemps. S'il y a bien une chose qu'elle a échoué dans sa vie, c'est de protéger son frère. C'est lui le plus grand, mais c'est aussi lui qui aurait peut-être eu le plus besoin de protection et de soutien. Mais elle était trop jeune quand Eli a commencé à déconner, à se détruire en essayant de survivre. C'est marrant quand on y pense, les meilleures mécanismes de défenses sont aussi ceux qui sont les plus dangereux, c'est le cas chez eux en tout cas ou chez Eli. Elle a essayé pourtant, s'est inquiétée pour lui, a tout fait pour tenter d'être présente pour lui quand elle s'est retrouvée à 18 ans, seule face à la vie d'adulte et les responsabilité. Mais, c'était trop pour elle seule. Et Eli n'a jamais été le plus simple à comprendre, le plus simple à aimer non plus, parce qu'il donne si peu et reprendre si vite. Il apparaît quand il le veut et disparaît la seconde d'après, et si elle lui en veut, elle ne peut pas le blâmer, elle n'y arrive pas parce qu'elle pourrait lui trouver toutes les excuses du monde, parce que c'est Eli. Parce que c'est son grand frère, celui qui a vécu le pire avec elle, celui qui était dans la même chambre qu'elle quand David venait décharger sa colère sur eux. Il était là, il a vécu ce qu'elle a vécu mais il n'a pas eu la même chance qu'elle ensuite. C'est ce qu'elle se dit, ce qu'elle pense pour défendre son frère, même quand il foire tout seul, même quand il enchaine les conneries, même quand il se retrouve en prison, elle lui trouvera des excuses parce qu'elle l'aime son frère, et pourtant elle sait que cette relation avec son frère ne pourra lui apporter que des ennuis, des nuits blanches et des moments de paniques. Elle a accepté ça y'a longtemps et si elle a répondu présente pour la sortie de prison de son frère c'est bien parce qu'elle n'aurait pas pu faire autrement, c'est ainsi que ça doit se passer. La situation n'a rien de simple et pourtant, ils arrivent à parler. Eli ne fuit pas la discussion, ils parlent de leurs sœurs, autre points communs entre eux et elle devine l'émotion d'Eli en jetant un regard en sa direction. Elle ne peut pas savoir ce qu'il ressent, elle ne peut pas prétendre le comprendre mais elle sait qu'il n'apprécierait pas une remarque d'Evie à ce moment précis alors elle se tait, et se contente de conduire, laissant à Eli le temps pour regarder et découvrir le visage changé de leurs sœurs et de Nova, celle qui a le plus changé en 5 ans. Il a râté cinq ans de la vie de ses sœurs, et cinq ans de la vie d'Evie aussi, mais pourtant, si elle devait raconter ces cinq dernières années, elle dirait sans doute qu'il n'a rien râté de mémorable. La preuve, elle est toujours la même qu'il y a cinq ans ou du moins sa vie affective est pareille.  « En même temps, v’là le modèle qu’on a eu aussi. » Un rire sans joie s'échappe de la bouche d'Evie. Le modèle qu'ils ont eu, est un sacré modèle d'échec en effet. Plusieurs compagnons, des pères ou plutôt géniteurs qui ont tous fuit, sauf un qui est resté pour les frapper. Un exemple de couple ils n'en ont jamais eu, ou du moins pas des couples fonctionnels et c'est peut-être ça le problème d'Evie ? Ce serait simple de se cacher derrière son passé, elle le fait parfois mais si elle aurait des raisons de le faire pour expliquer sa vie affective désastreuse, elle ne veut pas laisser à Aja le quelconque impact dans sa vie. « On sait au moins ce qu'il ne faut pas faire, reste à trouver comment faire pour garder un mec plus de quelques semaines, elle réussissait au moins à les garder le temps de la foutre en cloque. » Encore une remarque dans un rire, mais pas un rire joyeux, plutôt un rire de dépit, de colère aussi, parce qu'ils auraient mieux fait de fuir avant. Mais c'est un détail non ? 29 ans qu'elle n'a pas de nouvelles de son géniteur, et 11 ans qu'elle en a pas de sa mère, on peut pas dire que l'amour parental ait été très présent dans sa vie mais elle s'en sort et elle va continuer à s'en sortir sans eux. Et sans amour aussi, si c'est ce que le destin lui réserve. Elle est pas malheureuse, c'est ce qu'elle pense sincèrement. Un métier qu'elle aime et pour lequel elle donne réellement de sa personne, un petit appartement dans lequel elle se sent chez elle et en sécurité, elle n'a besoin de rien de plus, si ce n'est que ses proches soient heureux et en bonne santé. Et c'est un début avec Eli qui est enfin libre. Elle est sincèrement heureuse de le voir dehors, enfin, mais en même temps elle réalise que son frère pourrait y retourner un jour ou pire encore, maintenant qu'il a retrouvé sa liberté, il a aussi retrouvé la liberté de refaire ses conneries. Elle ne veut pas y penser, elle ne veut pas songer aux nuits blanches qu'elle risque de passer, enfin pas tant qu'il aura son bracelet, au moins elle sait qu'à 22 heures il sera chez lui. C'est un moyen comme un autre pour se rassurer non ? Il y a toute la journée pour faire des conneries s'il le veut, mais elle doit lui faire confiance, si elle ne le fait pas qui va le faire ? Pas Aja, pas le système judicaire, alors elle doit y croire et le soutenir. Pourtant, la réponse que s'apprête à lui donner Eli ne va clairement pas l'aider. « J’vais aller chez Joseph. Il est sorti y’a pas longtemps. » Joseph. Sorti il n'y a pas longtemps. Il ne faut pas longtemps, vraiment pas longtemps pour qu'elle fasse le lien et elle croit rêver. Elle qui pensait qu'au moins de 22h à 8h son frère serait en sécurité, elle apprends qu'il va loger avec le même qu'elle tient pour responsable de tout ce qui est arrivé à son frère. La drogue. La prison. Et dans sa tête, tout de suite, elle se dit que ça va recommencer, encore. La drogue. La peur de voir son frère se faire arrêter, faire une overdose ou se faire tuer. « T'es pas sérieux ? Tu penses que c'est une bonne idée ? » Elle est du genre à donner une chance à tout le monde. Même deux, trois, quatre parfois quand il s'agit notamment d'Eli, mais pour Joseph, c'est une autre histoire et elle ne cautionne pas du tout le choix de son frère, mais elle sait aussi qu'il n'en a que faire de son avis et qu'elle devra faire avec. Tant pis pour elle, et pour ce petit répit qu'elle pensait avoir, elle devra s'inquiéter pour lui 24h/24 à partir de maintenant. Elle pense tellement de chose sur cette cohabitation, mais elle n'en dit finalement pas grand chose, ne voulant pas risquer de voir Eli se fâcher avec elle dès sa sortie de prison, ils auront bien d'autres sujets pour sa fâcher et d'autres moments aussi.

Et si Joseph était déjà un sujet sensible, évoquer Aja a au moins le mérite de les mettre d'accord. Ni Eli, ni Evanna n'a de contact avec leur mère et elle ne mérite même pas ce titre si vous voulez mon avis et celui d'Evie. Et Aja a du elle aussi le comprendre puisqu'elle n'a même pas cherché à reprendre contact avec eux. Ses propres enfants, elle les a oublié et c'est peut-être finalement le mieux qu'elle pouvait faire pour eux. « Même pas en rêve. » Evie aimerait en dire de même, qu'elle peut choisir de ne pas la voir même en rêve mais elle n'a pas encore trouvé le mode off pour les cauchemars et dans ceux ci, Aja apparait souvent, sous une forme humaine ou pas d'ailleurs, mais c'est elle et Evie le sait. « J'aimerais ne plus la voir dans mes rêves aussi. Tu fais encore des cauchemars ? » Elle n'en parle pas, ou qu'à son psy, mais son frère c'est différent et si lui n'est pas le plus bavard et le plus ouvert à la discussion, avec lui, Evanna se sent à l'aise pour évoquer ça, parce que dans un sens, même s'il ne veut pas en parler, elle se dit que lui peut comprendre. Mais, hors de question de gâcher les retrouvailles avec ce genre de souvenirs, alors elle balaie les souvenirs et laisse ses cauchemars pour plus tard, quand la nuit sera tombée et qu'elle sera seule dans son lit. « Laisse tomber ma question, c'est une belle journée, on va pas la laisser gâcher un autre moment de notre vie non ? » Elle c'est bien sur Aja. Elle n'est plus là, et pourtant encore trop présente et Evanna ne veut pas lui donner ce pouvoir. Elle a son frère avec elle, et elle ne veut pas que son premier jour soit passé à reparler d'Aja et leur passé merdique qui a sans doute mené tout droit Eli en prison. Il est dehors et c'est le plus important pour Evie. Ca, son bonheur mais aussi celui de leurs sœurs et elle espère juste que tout ça ne soit pas incompatible. Que le bonheur et la liberté de son frère, ne sera pas synonyme d'inquiétudes et de blessures pour ses sœurs. C'est aussi ce dont elle doit s'assurer, parce que c'est son rôle. Il est pourtant le plus âgé de tous, mais c'est elle la plus responsable, c'est elle qui doit s'assurer qu'il ne blesse pas les filles Cash. Surtout Nova, qui est la plus douce, la plus fragile, la plus jeune d'entre elles. Evie se sent coupable de devoir dire ces mots à Eli, se sent coupable de penser qu'il y a besoin de ça entre eux, mais elle sait aussi que c'est important de le dire, bien que peu agréable. « T’as pas besoin de me le dire. » Oh que si elle a besoin. Mais elle n'insiste pas. Pourtant elle aurait envie de lui dire tellement de chose. Lui dire à quel point sa condamnation lui a brisé le cœur et qu'elle a passé des nuits à pleurer en le sachant enfermé loin d'elle. Elle voudrait lui dire, à quel point, le savoir dehors la terrifie autant que ça la rassure, parce qu'il est mieux dehors que dedans, libre qu'enfermé, mais qu'elle a autant peur pour lui dehors que dedans. Elle voudrait lui dire à quel point elle a besoin de lui même si elle ne le montre pas, parce qu'elle sait que c'est trop à porter pour lui et qu'il ne veut pas de cette responsabilité. Alors, elle se tait. La musique qu'il a allumé faisant office de bruit de fond permettant de laisser un peu le silence entre eux s'installer sans que ça ne soit trop lourd. La musique a toujours eu un effet apaisant sur Evie et aujourd'hui ça a cet effet encore alors qu'elle se fait à fredonner puis à chanter doucement les paroles de la chanson qui passe à la radio. Elle a tant de chose à dire à son frère, tant de chose à dire au monde et elle sait qu'un jour ce moment, ces mots qu'elle n'a pas su dire se retrouveront sur un bout de papier, dans une chanson qu'elle aura écrite mais qu'elle ne jouera jamais parce que c'est son truc. « Tu vas le garder combien de temps le bracelet ? » La chanson est à peine finie, que les mots d'Evie ramènent à la réalité les deux Cash. Il est dehors, mais pas totalement libre et pleins de questions planent encore sur l'avenir d'Eli, sur ses projets, sur ses ambitions, sur la manière dont il a choisi de vivre sa vie désormais, mais elle ne veut pas l'assommer de questions sous peine de le faire fuir.

the end of a chapter

@Evanna Cash  ☆ Eli Cash

gifs by (c) pinterest

août / 2024
devant la prison de Bristol

L’ambiance est lourde dans la voiture et la carrosserie porte le poids du passé commun que le frère et la soeur n’ont pu que partager ensemble, les souvenirs remontant souvent à la surface sans pour autant les nommer à voix haute. Eli est heureux de retrouver sa petite sœur, même s’il ne saura sûrement jamais comment lui évoquer avec ces mots ; il est heureux tout autant qu’il sait qu’une épée de Damoclès pend au-dessus de sa tête. Il y a encore tellement de non-dits entre eux aujourd’hui, tellement de déception et de colère, de frustration et d’ennui, tellement de choses à décortiquer qu’ils ne feront pas aujourd’hui. Et y’a de grandes chances pour qu’Eli ne se lance jamais sur ce terrain-là, refusant de reconnaître ses torts à voix haute et ne supportant pas d'être confronté à ses fautes. Il aurait pu tourner différemment, bien sûr qu’il aurait pu. Eli était un grand frère aimant dont la priorité absolue était de prendre soin de ses sœurs et ce, dès son plus jeune âge. Il se souvient de cette petite enfance avec beaucoup de vivacité, se rappelle avoir changé les couches, coiffé les plus jeunes, donné à manger, bercé, raconté des histoires, serré très fort  dans ses bras. Il couvrait les cris de chansons, Evie toujours à ses côtés - chacun un refrain, chacun une sœur dans les bras. Il ne peut que se souvenir de cette période avec un pincement au cœur ; il y a bien longtemps qu’il n’est plus cette personne et il ne saurait même pas comment y retourner, pas non plus certain de vouloir l’être. Le changement n’a pas été brutal, il ne s’est pas levé un matin pour changer radicalement de comportement ; tout s’est fait petit à petit, s’il continuait de sortir du foyer la nuit, les moments où il le faisait pour retrouver ses soeurs se sont espacés, laissant peu à peu place à un monde bien différent. C’est ainsi que la descente aux enfers a commencé, le menant tout droit jusqu’à ce jour où il ne sait même plus ce qu’il est censé dire à Evanna, parce que y’a trop de choses entre eux désormais et qu’Eli n’est pas - et n’a jamais été - le genre à parler.

Alors il préfère se concentrer sur le présent pour le moment, posant des questions à sa petite sœur, essayant de rattraper un peu le temps perdu peut-être, inquiet à l’idée de mettre les pieds là où il ne faudrait pas. « On sait au moins ce qu'il ne faut pas faire, reste à trouver comment faire pour garder un mec plus de quelques semaines, elle réussissait au moins à les garder le temps de la foutre en cloque. » Ouais, on peut pas lui enlever ça, c’est sûr. Mais comme beaucoup de sujets quand ils s’aventurent sur une pente où Eli ne souhaite pas se rendre, il décide de ne pas y répondre. Il entend que la vie sentimentale de sa sœur semble être au point mort - et tant mieux pour elle, qu’il a envie de dire - mais il ne se lancera évidemment pas à parler de la sienne, pour autant qu’il en ait une. Difficile de se positionner sur la question. Alors il enchaîne, laisse passer le moment, regarde par la fenêtre, répond aux questions - même quand les réponses ont de grandes chances de ne pas plaire et il sait pertinemment, dès qu’il prononce le prénom de Joseph, que cela ne va pas plaire. « T'es pas sérieux ? Tu penses que c'est une bonne idée ? » Il soupire, lève les yeux au ciel, gamin qu’il peut être. « Commence pas Ev. » qu’il se contente de répondre, sûrement bien loin d’être suffisamment rassurant mais ce n’est pas là son intention. C’est simple, il ne pourra jamais faire comprendre à Evanna la relation qui les lient, lui et Joseph. Elle ne connaît pas l’histoire, ni tout ce qu’il a fait pour lui quand il aurait pu le mettre dans une merde si profonde qu’il n’en serait sûrement pas sorti vivant - ou juste libre. Elle ne connaît rien de cette amitié profonde, de ce frère qu’il a trouvé en lui, des galères mais de l’affection évidente qui perle entre eux. Et il n’a pas envie de lui expliquer, pas envie de se perdre en explications et longs monologues qui ne la feront sûrement pas changer d’avis. Car les cases sont ce qu’elles sont et il y a en a une grosse avec l’inscription “délinquance et drogues” où il est rangé aux côtés de son ami. Il est persuadé qu’aucune explication ne fera changer les cases dans l’esprit de sa jeune sœur, alors, à quoi bon essayer ?

Il se rend bien vite compte que y’a aucun sujet plus facile qu’un autre ; et c’est sûrement sa faute. « J'aimerais ne plus la voir dans mes rêves aussi. Tu fais encore des cauchemars ? » Il sait qu’Evanna est comme lui, que parler de ces choses-là est quelque chose de difficile - voire d’impossible - pour la jeune femme. Il sait aussi que leur relation à eux deux est différente, tâchée par les erreurs du plus âgé, mais qui n’empêche pas qu’elle semble se sentir suffisamment à l’aise pour lui confier ce secret. Il met du temps à répondre, pas certain d’avoir envie d’en parler, pas sûr de savoir quoi dire - si seulement y’avait qu’elle dans ses cauchemars. « Laisse tomber ma question, c'est une belle journée, on va pas la laisser gâcher un autre moment de notre vie non ? » Est-ce qu’elle le pense vraiment ou est-ce qu’elle a besoin ? Eli se rend compte qu’il n’est plus certain de réussir à lire sur les traits d’Evanna - encore une chose qu’il ne peut reprocher qu’à lui-même. « ça m’arrive. » qu’il se contente alors de lui donner, haussant les épaules comme si c’était plus simple de faire penser qu’il s’en moque. « J’ai connu un gars à l’intérieur qui faisait de la méditation ou du yoga, j’suis plus sûr. Tu devrais essayer. » Il a passé un bon moment à se foutre de sa gueule, se mêlant au reste du groupe pour lui balancer quelques injures qu’il se répétait le soir dans sa tête, pour lui cette fois-ci. « Paraît que ça aide. » Comme s’il y connaissait quelque chose, lui ne s'aventurait évidemment jamais dans ce genre de connerie et c’est sûrement une erreur de sa part.

Il est pas loin d’ouvrir la portière et de sortir de la voiture en marche, pas super heureux d’assister à son procès en continu. D’abord Joseph, maintenant les filles ; le voilà qui regrette déjà de ne pas avoir demandé à qui que ce soit d’autre de venir le chercher. Il soupire à nouveau, force un peu le trait pour montrer son mécontentement et heureusement, elle n’insiste pas plus, le connaît suffisamment pour savoir que sa patience a des limites et qu’il n’est déjà pas loin de les franchir. « Tu vas le garder combien de temps le bracelet ? » « Deux ans. » C’est ce qu’on lui a dit, mais tout ça vient sous de trop nombreuses conditions. C’est pas juste un ornement à porter pour faire joli, c’est le souvenir des contraintes qu’il doit respecter pour rester libre. Le moindre faux-pas le mènera tout droit en prison, de nouveau, alors il doit se tenir à carreaux et pour le moment, il en a bien l’intention. « Tu dois être contente. » il peut pas s’empêcher de rétorquer, connaissant suffisamment Evie pour savoir qu’elle préfère le savoir surveillé que complètement libre. Elle n’a pas confiance en lui, et il peut pas vraiment la blâmer pour ça. Faut dire qu’il l’a volée, qu’il a passé un temps conséquent à lui mentir sans vergogne. Non, il peut pas lui reprocher de ne pas lui faire confiance. « J’suis fatigué en fait, ça te dit tu me déposes direct chez Jo ? » qu’il demande finalement sans oser la regarder, sachant pertinemment qu’il va là la décevoir mais ayant déjà épuisé son quota de reproches déguisés pour la journée. Eli, dans toute sa splendeur.

THE END OF A CHAPTER

@Eli Cash ☆ Evanna Cash

gifs by (c) arisgifpacks et (c) harleygifstock2

août / 2024
devant la prison de Bristol
Ils ont vécu des choses horribles ensembles, les mêmes traumatismes, les mêmes coups, les mêmes insultes, la même peur à chaque fois qu'il rentrait chez eux et que les deux goss entendaient la porte claquer et la main frapper le visage de leur mère. Ils ont vécu ça ensemble, et pourtant ils sont très différents. Eli, Evie. Evie, Eli. Deux inséparables quand il a fallu protéger leurs petites sœurs, mais que la vie a éloigné, séparé et sur leur chemin, individuellement ils ont grandi, changé, et aujourd'hui, le lien qui les unit semble toujours sur le point de rompre à tout moment. Parce qu'il y a trop de silences laissés, trop de non-dits, trop de jugements, trop de difficulté à communiquer, pourtant il n'y a aucun doute, Evie aime son frère. Trop sans doute pour son propre bien. Aujourd'hui encore elle va en souffrir mais elle le savait en venant le chercher pour son premier jour hors de cette prison. Elle en avait conscience et pourtant, elle ne s'est pas protégée. Elle n'a pas fait attention à ce qu'elle pouvait dire, à ce qu'elle pouvait reprocher ou demander à son frère. Elle n'a pas réfléchis à la portée et aux conséquences de ses paroles. Trop de paroles d'un côté, trop de silence de l'autre. L'une veut parler, l'autre ne veut que se taire, ni elle, ni lui n'a vraiment raison ou tord, ils sont différents et ils gèrent différemment. Elle a besoin de lui, il n'a besoin de personne ou c'est ce qu'il veut faire croire, ou du moins il n'a pas besoin d'elle parce qu'il a du apprendre à se débrouiller seul dès son plus jeune âge, alors elle ne le blâme pas. Elle blâme leur mère, elle blâme David, elle blâme le système, elle se blâme elle-même et elle blâme Joseph aussi. Tout le monde pour éviter de vraiment voir le mal que peut faire son frère. Pourtant, il se met dans les embrouilles tout seul, son enfance gâchée par des adultes, il a gâché tout seul sa vingtaine et elle craint désormais qu'il ne gâche aussi sa trentaine. A peine sorti qu'il remet les pieds dans les mêmes relations, avec les mêmes gens, comment ne pas en vouloir à Evie de s'inquiéter du jugement de son frère ? Elle n'a besoin que d'être rassurée finalement, mais son frère n'a jamais su le faire. « Commence pas Ev. » Il soupire, lui reproche sa question pleine de jugement, il ne donne aucune réponse et il ne fait que laisser Evie avec sa tonne d'angoisses qui ne fait qu'augmenter à mesure qu'elle redécouvre qu'encore une fois elle ne pourra rien pour lui. Qu'il ne la laissera pas l'aider. Alors, elle se contente de penser à tous les scénarios qui pourraient mal tournés. Elle se contente d'imaginer deux anciens dealeurs, anciens prisonniers vivant sous le même toit et dans aucun des scénarios qui s'écrivent dans sa tête, l'issue n'est positive. Pourtant, elle croit en lui, c'est difficile à croire non ? Mais, elle croit que son frère est une bonne personne qui a fait les mauvais choix, et ce choix de vivre avec Joseph est le premier mauvais choix de son frère depuis sa sortie, il y a 10 minutes à peine. Elle a du vivre sans lui à cause de Jo, et elle sait que si elle insiste elle risque de le perdre à nouveau, alors elle fait comme souvent, elle se tait et se débrouillera plus tard avec ses craintes, ses angoisses et ses peurs.

C'est ainsi qu'elle fonctionne, parfois elle écrit, parfois elle s'ouvre un peu avec sa psy, et parfois elle se contente d'essayer d'oublier. C'est ce qu'elle essaye de faire avec Aja, avec ses rêves, avec ses souvenirs et si la journée elle y arrive plutôt bien, la nuit elle n'a plus le contrôle et les cauchemars reviennent nombreux. Ca non plus elle n'en parle pas, de ses cauchemars, de ce qu'ils contiennent. Eli pourrait en deviner certains pour avoir vécu les mêmes moments qu'elle, mais il ne sait pas tout. Aja ne fait plus partie de leur vie, ni même David, mais les souvenirs sont gravés en eux même des années après. Elle ne veut plus que sa vie soit dictée par son passé, elle vit l'instant présent, pense au futur mais laisse le passé derrière elle et il n'y a finalement qu'avec Eli qu'elle ose l'aborder, mais jamais très longtemps. Parce qu'elle ne veut pas le faire fuir et parce qu'elle sait que ce n'est pas un sujet joyeux pour eux, pour personne d'ailleurs. Alors elle l'évoque puis le rejette, elle en parle puis passe à autre chose, comme si tout ceci n'était rien, et qu'il suffisait de ne plus en parler pour que ça n'existe plus. Faux. Mais, c'est une méthode comme une autre. « ça m’arrive. »  La réponse arrive tard, mais il lui parle, il réponds, il est honnête et c'est assez rare pour le souligner. Elle n'a pas plus d'info sur les cauchemars d'Eli et elle sait qu'elle n'en aura pas plus. « Je la déteste. » Elle le soupire entre les lèvres, c'est rare d'entendre Evie prononcer ce genre de chose, de l'entendre dire ces mots là mais pourtant si ça lui fait du mal de les dire, de ressentir ce genre de chose, ça lui fait aussi du bien paradoxalement de pouvoir l'exprimer. Oui elle déteste Aja, et personne ne peut lui reprocher ce sentiment, surtout pas Eli non ? « J’ai connu un gars à l’intérieur qui faisait de la méditation ou du yoga, j’suis plus sûr. Tu devrais essayer. » C'est un conseil qu'il lui donne et Eli n'est pas forcément le mec qui donne le plus de conseil, et on dirait presque qu'il s'intéresse à Evie, qu'il veut l'aider ? C'est ce qu'elle pense en entendre cette remarque de son frère, elle a désespérément besoin de ça. Pas du yoga, mais de sentir que son frère s'inquiète pour elle, qu'il pense à elle, qu'il veut la protéger, l'aider comme il le faisait enfant. Mais ils ne sont plus enfant depuis longtemps et Eli ne sait déjà pas prendre soin de lui comment pourrait-il prendre soin d'elle ? « Parait que ça aide. » Visiblement il n'a pas essayé lui, il ne sait pas et Evie n'en est pas étonnée, elle l'imagine mal faire du yoga. « Ma psy m'a déjà parlé de la méditation ou même de l'hypnose mais ça me fait peur. Par contre j'essayerais le yoga et je te dirais si ça aide. » Elle pourrait lui proposer d'en faire avec elle, mais elle connait assez Eli pour savoir que cette proposition sera suivie d'un refus et peut-être même d'une moquerie donc elle ne s'aventure pas dans cette direction.

Pourtant, la direction qu'elle emprunte est pire encore. Elle réussit en quelques minutes à refroidir l'ambiance qui pourtant n'était pas bien chaleureuse au vue de leurs échanges. Aja, leurs sœurs, Joseph, beaucoup de sujets glissants, dangereux et la sortie de piste finit par arriver. Et si les différents sujets avaient un potentiel de danger élevé, ce n'était pas sur le bracelet qu'Evie pensait que leur discussion se terminerait et pourtant. Elle a sans doute demandé trop, trop vite. Elle a sans doute poussé à bout son frère sans le vouloir. Et quand elle entends les mots de son frère, cette remarque qui claque dans l'habitacle de la voiture, elle sait que c'est la fin.  « Tu dois être contente. » Il a raison, elle ne peut pas lui mentir mais ne peut pas lui dire la vérité pour autant. Elle n'est pas contente, mais plutôt soulagée. Elle n'est pas heureuse mais le bracelet signifie qu'il est enfin dehors, mais pas complètement libre. Elle n'est pas satisfaite de cet état mais au moins quelqu'un l'aide un peu à veiller sur lui, même si on est plutôt sur de la surveillance dans le cas du bracelet. « Non, je veux juste te savoir loin de cette prison. » Elle lui ment, un peu, mais pas vraiment parce que finalement c'est la vérité. Elle veut le savoir loin de cet endroit, elle veut le savoir libre, elle veut le savoir heureux, mais chaque chose en son temps, déjà hors de la prison pour le reste, c'est pas encore pour demain.  « J’suis fatigué en fait, ça te dit tu me déposes direct chez Jo ? »  Elle ne le regarde pas, reste concentrée sur sa route, cache cette peine qu'il est en train de faire naitre en elle. Elle s'en doutait, elle savait qu'elle allait souffrir mais peut-être pas aussi vite, pas de cette façon. Plusieurs années passées séparés et il ne lui accorde même pas quelques heures, elle a mal mais ne dit rien. Comme depuis quelques années, elle va se taire pour ne pas le perdre définitivement parce qu'elle ne supporterait pas ça. « Si tu veux, mets l'adresse sur le gps et je te dépose la bas. » Elle essaye de rester détâcher de cette situation, elle s'en remets à ses entrainements, à cette attitude qu'elle doit avoir en intervention face à des victimes ou des personnes terrorisées, elle cache ses émotions, et c'est peut-être la première fois qu'elle le fait devant son frère. Elle est terriblement blessée, touchée, déçue, elle a mal mais elle ne le montrera pas. Et comme devant un inconnu, elle se ferme, sauf que ce n'est pas un inconnu, c'est Eli. Et pour la première fois, elle lui ressemble presque un peu, elle se tait, et fuit ses émotions, fuit la discussion parce qu'il a décidé que c'était ainsi entre eux et elle a trop souffert, aujourd'hui elle arrête de souffrir, du moins devant lui.