s'évader (koby)

Coby est rentré, après deux semaines de tournée dans l’ouest de l’Europe, lui et son groupe sont revenus à Bristol pour pouvoir profiter d’u moment d’accalmie. Vivre avec un musicien, ce n’est pas forcément facile. Il n’est pas souvent à la maison et Kennedy se sent parfois un peu seul. C’est pour cette raison qu’il cherche à voir sa famille le plus souvent possible, à tenter de nouvelles aventures ou partir avec son bateau en pleine mer sans se soucier du reste. Il lui faut peu, il le sait, et se satisfait de ce qu’il a le plus souvent. Une vie simple qui lui convient, mais il aimerait plus, il voudrait toujours plus.

Après quelques préparatifs, les deux époux ont décidé de partir en mer avec leur bateau pour ne pas avoir à se préoccuper du monde environnant. C’est peut-être égoïste, c’est peut-être une mauvaise idée. Mais ils ont besoin de s’isoler, de pouvoir se retrouver de manière fusionnelle et inconditionnelle. Quelques courses ont été réalisées, premières nécessités pour pouvoir se nourrir et se soigner en cas de blessures bénignes. Puis ils sont allés au port, embarqué à bord du voilier que Kennedy avait acheté à la sortie de son aventure aux Fidji.

Une fois en pleine mer, ils ont d’abord commencé par installer tout convenablement, à mettre un itinéraire et surtout à veiller à ne pas trop s’éloigner de la côte, le but n’est pas de partir en voyage, ils le feront un jour ou l’autre ça, c’est prévu, mais pour cette fois.

Tous les deux installés sur le pont du bateau, allongés sur les transats, ils laissent la chaleur d’un soleil automnal caresser leurs peaux bien blanches à cause du manque d’exposition de ces dernières semaines à l’astre central du système solaire. Ken jette alors un œil à son mari, avec toujours le même regard, celui qui est fou amoureux et qui se rend compte de la chance qu’il a de pouvoir vivre avec lui.

— C’était comment cette dernière tournée ? Tu m’en n'as pas parlé pendant qu’on faisait les préparatifs.

Kennedy se redresse en position assise sur son transat pour attraper les deux bouteilles de bière qui sont posées sur la table, il les décapsule d’un geste rapide avant d’en tendre une à Cody. Petite habitude, boire un coup quand ils sont en pleine mer, c’est plutôt… original à vrai dire. La sensation de l’ivresse quand on roule sur les flots est grisante.

Juillet 2019.
« Non, sérieusement ? Tu nous vois ensemble ? Ou juste imagine-moi dire à mes amis « alors, voilà, mon mec, c’est ken, le mec canon de barbie, et il a un bateau sur lequel il m’emmene tel un amant sur son cheval blanc ». Il rit aux éclats, bafoue même, s’imaginant apparaître comme un mec gnagnan face à ses camarades. « nan, kennedy, faudra plus que ça pour m’avoir, j’te l’dis ». dit Coby, en reprenant son sérieux après avoir trinqué une nouvelle fois avec lui en faisant tinter sa bierre avec la sienne. Et même s’il ne voulait pas se l’avouer encore, son cœur avait été déjà conquis. Le bateau n’était qu’un ornement de plus sur ce gâteau que lui offrait la vie.

Octobre 2024.
Cinq ans plus tard, il se retrouvait à nouveau sur ce bateau. Ce n’était pas la première fois que Coby y montait et y retournait – et même s’il avait du mal à l’admettre, il aimait bien cela. Derrière les lunettes de soleil, il contemplait les vagues, pensif, évasif, pensant à nouveau ce qu’il s’était passé il y a deux jours, aux paroles de son bassiste envers le groupe : « Faut qu’on profite à fond de tous ces moments, parce qu’un jour, ce sera fini. Y’en aura un qui aura un marmot, et il arrêtera, un autre qui se casera. On peut même être surpris que Coby soit encore parmi nous. » Petit rire gêné du Monaghan alors qu’il fit tourner quelque peu son alliance avec un petit pincement au cœur. C’était les moments comme ça qu’il voulait rendre éternel – tout comme les moments qu’il partageait avec Ken alors il n’arrivait pas à saisir pourquoi il ne pouvait pas avoir les deux.

Il se sentait encore quelque peu lourd, quelque peu fatigué : il était rentré tard la veille, aux approches de minuit, n’ayant que le temps d’embrasser son mari sur le front, lui chuchotant un « Bonne nuit, on parlera demain » avant de se blottir quelques instants dans ses bras et de se plonger dans une nuit de sommeil bien méritée...

« Hein ? Quoi ? » dit-il, fronçant les sourcils, n’ayant pas l’air sûr d’avoir compris. Pourtant, il l’avait bien entendu. Il saisit la bière tendue, ingrédient parfait pour contempler le paysage ensoleillé de cette après-midi en mer. « Ouais, ouais, ça s’est passé ». fit-il avec une moue involontairement maussade. « Ces histoires de groupes et de label stressent un peu. On sait pas trop où on va aller, ni comment ça va finir. » dit-il. « Mais, c’était cool. Franchement, les bulgares nous ont vachement bien accueilli par rapport aux Allemands qui, eux, étaient plus sur la retenue. » Il but quelques gorgées. « Et toi ? Survivor All Stars, ça en est où ? C’est que ça me manque de mater des beaux gosses à la télé. » dit-il avec un petit sourire en coin. « D’ailleurs, je crois que je te l’ai jamais demandé mais t’as pas voulu être comme ces mecs qui enchainaient télé-réalité sur télé-réalité ? Bon, ceci étant dit, tant mieux, sinon t’aurais peut-être fini dans le Geordie Shore et moi dans les Real Housewives of Bristol ». Il tentait de reformuler sa question pour être plus clair : « Genre, tu ne t’es pas dit que peut-être les choses auraient été mieux autrement. »

La vérité, c’est qu’il commence à se sentir las parfois de voir son mari partir pour de longues tournées. Mais le problème, c’est qu’il ne se voit pas le lui reprocher. C’est son rêve, c’est ce qu’il aime le plus. Jacob a toujours souhaité vivre de la musique, il le lui avait dit, et s’il peut le faire, autant qu’il le fasse et lui briser les ailes n’est pas ce dont il a envie. Coby ? Lui ne lui ferait jamais quelque chose dans ce genre-là, bien au contraire. Leurs attentes ne sont pas toujours les mêmes, ils le savaient déjà, mais… Ken voudrait plus, il aimerait que Coby soit plus présent pour lui.

— Hein ? Quoi ?

Il répète tout en lui tendant sa bière, regardant le soleil loin dans le ciel. Ils décapsulent, ils commencent à boire tout en profitant de l’air qui caresse leur peau, fait bouger les boucles de leurs cheveux.

— Ouais, ouais, ça s’est passé, et cette expression est dite avec un air maussade. Ces histoires de groupes et de label stressent un peu. On sait pas trop où on va aller, ni comment ça va finir.

Coby ne sait pas, et ce n’est pas une bonne chose, tout cela c’est du stress en plus. Faire un métier artistique, ce n’est jamais de tout repos et la popularité que l’on peut avoir peut s’éteindre en un claquement de doigt.

— Mais, c’était cool. Franchement, les bulgares nous ont vachement bien accueilli par rapport aux Allemands qui, eux, étaient plus sur la retenue.

Pas étonnant, mais après tout, il n’a jamais été dans ces deux pays. Ce qu’il en sait, ce sont les stéréotypes qui sont véhiculés par ce que l’on en voit à la télévision ou dans les films et séries. Ce qui sont des représentations biaisées de la réalité et tout le monde le sait.

— Au moins, ça s’est bien passé.

C’est tout ce dont il avait besoin, savoir qu’il n’y a pas eu de problème particulier lors de cette tournée. Kennedy est quand même soulagé bien qu’il ne montre pas vraiment. Il regarde encore le soleil réchauffer la et lécher la peau des joues de son mari, tendrement.

— Et toi ? Survivor All Stars, ça en est où ? C’est que ça me manque de mater des beaux gosses à la télé.

C’est un des gros regrets de Kennedy, ne pas avoir eu l’occasion de repartir pour une édition d’anciens candidats. Cela a déjà été fait, et peut-être que pour une prochaine fois, il se tient prêt à tout, et semble même encouragé par ses fans sur ses réseaux sociaux. Comme toute réponse, il hausse les épaules en buvant une nouvelle gorgée de bière.

— D’ailleurs, je crois que je te l’ai jamais demandé mais t’as pas voulu être comme ces mecs qui enchaînaient télé-réalité sur télé-réalité ? Bon, ceci étant dit, tant mieux, sinon t’aurais peut-être fini dans le Geordie Shore et moi dans les Real Housewives of Bristol.

— Autant crever, j’ai pas envie d’aller avec les décérébrés.

Faire de la téléréalité peut-être, mais pas n’importe laquelle, les jeux de survie, c’est son truc, pourquoi pas culturel, mais il n’a pas envie d’aller se confronter à des Kevin ou des Sabrina qui ont un QI presque aussi élevé que des poules de basse-cour.

— Genre, tu ne t’es pas dit que peut-être les choses auraient été mieux autrement.

Il commence à paniquer cette foi, et Kennedy s’arrête avant de poser la bouteille sur un emplacement prévu pour les verres afin que leur contenu ne se renverse pas avec le remous des vagues.

— Attends, t’es pas heureux ? Tu penses que… enfin attends, je comprends rien là…

Le souci dans cette histoire, c’est qu’il se pose souvent la question. Coby ne veut pas d’une vie trop rangée, il ne veut pas d’enfant alors que Ken en désire un. Ces différences sont parfois des ponts qu’ils ne parviennent pas à franchir, mais leur amour est plus fort. Du moins il espère que ce sera suffisant pour que les ponts se brisent et qu’ils marchent sur la même rive.

— Si t’es pas heureux, tu peux me le dire…

En fait, il ne comprend pas ce que son mari lui dit, ce qu’il sous-entend dans cette phrase d’apparence aussi anodine, et cela transmet peut-être de mauvaises impressions. Seulement, s’il pense de cette manière, c’est aussi à cause de ses inquiétudes profondes, de ce qu’il a en tête et dans le cœur.

Juillet 2024.

« Genre, tu ne t’es pas dit que peut-être les choses auraient été mieux autrement. » Cette phrase résonnait comme un écho dans un des éclats d’un miroir brisé, à savoir celui qui gisait dans l’esprit de son père, à la fois contrarié et triste. « Jacob, tu ne penses pas que tu aurais pu faire les choses autrement ? Te trouver une demoiselle sympathique… » à comprendre riche. « …. Te marier, avoir des enfants, te trouver une maison… » Cette image traditionnelle ne faisait que réveiller les plus sombres cauchemars de Coby. « Mais, je l’aime, papa. » Un pouffement, un non-dit de la part de son père. « Ce monsieur muscles qui aime tortillonner du corps et jouer les Tarzan à la télé pour faire le buzz ? Sérieusement ? » Coby avait seulement besoin de savoir si ses parents allaient venir à leur mariage. Ils faisaient partie des derniers sur la liste à ne pas avoir donné de réponse. « Il est plus que ça.. » dit le fils, l’air faché avant de lui tourner le dos. « La vie est trop courte pour avoir des regrets, fils. » lâcha le père, contrarié. (…)

Une musique de mariage en fond ambiant, les familles et amis proches réunis pour célébrer l’union des deux à l’hôtel de ville de Bristol. « Mr. Jacob Ezechiel Monaghan, consentez-vous à prendre pour époux Mr. Kennedy Swann ? De lui promettre de rester fidèle, dans le bonheur et dans les épreuves, dans la santé et dans la maladie, et de l’aimer dans tous les jours de votre vie ? » Les yeux humides, émus, fringant dans un costume, il lui faisait face, lui donnant ses mains, petit sourire en coin. Le doute n’avait pas sa place ici : « Oui. »

Maintenant.
Malgré lui, il sait ce que cette phrase vient de déclencher. Une tornade. Il savait om se situaient les insécurités de Ken – ou du moins, le croyait-il – mais il avait toujours priorisé les siennes de manière inconsciente, comme un besoin maladif de survie. L’air surpris et dépassé, Coby haussa le ton : « Ce, c’est pas ce que je voulais dire ! » Il déglutit, quelque peu, cherchant ses mots. « Je suis heureux, mais est-ce que toi, tu l’es ? » demanda-t-il d’un regard inquisiteur. Il but une nouvelle gorgée comme s’il avait besoin d’un fluide pour mieux parler, mieux se faire entendre, mieux se faire comprendre. « Ce que je veux dire, c’est – je pars de temps à autre, je culpabilise de te laisser tout seul et toi… qu’est ce qui se passe quand je suis pas là ? » Et il savait que Kennedy avait ses projets, ses voyages mais ce n’était pas la même chose qu’un train de vie. « Et c’est pas comme si t’étais heureux de me voir partir… » Il avait déjà emmené Ken en tournée une fois ou deux mais le groupe était tellement fort et soudé que les accompagnateurs se retrouvaient très vite exclus et il ne voulait pas multiplier les blessures.

Il a peur de comprendre que Coby n’est pas heureux dans leur relation, qu’elle l’étouffe et qu’il veuille tout arrêter, que c’est de trop pour et qu’il ne le supporte plus. C’est une chose que Ken peut entendre, mais il veut en être certain, il veut que les voiles soient levés pour avoir toute l’étendue de la situation sous les yeux. Il ne veut plus souffrir, il ne veut pas que son cœur soit brisés en millions de morceaux, et c’est ce qui semble se profiler quand il entend son mari parler de la sorte. Il savait que ce genre de moments allaient arriver, c’était inévitable, ils ne sont pas sur la même longueur d’ondes pour beaucoup de choses, c’était trop pour lui, et Kennedy le savait en le demandant en mariage, il savait qu’il y aurait de tels douleurs à venir, des sacrifices à faire et surtout des souffrances qu’il ne manquerait pas de ressentir. Il ne pensait cependant pas que cela arrivera aussi tôt… quelques mois à peine après s’être dit oui devant leurs familles, leurs proches et amis.

— Ce, c’est pas ce que je voulais dire !

Il hausse le ton, comme pris par la colère, et Kennedy se perd encore plus dans les interprétations de sa psyché tordue.

— Je suis heureux, mais est-ce que toi, tu l’es ?

La question lui retombe dessus comme un couperet, le prend de court et il ne sait pas quoi répondre, reste là, le cœur battant trop vite, les couleurs et les promesses se mélangent, il n’arrive plus à être courageux, comme il l’est d’habitude.

— Ce que je veux dire, c’est – je pars de temps à autre, je culpabilise de te laisser tout seul et toi… qu’est ce qui se passe quand je suis pas là ? Et c’est pas comme si t’étais heureux de me voir partir…

C’est donc de cela qu’il s’agit. Il pince les lèvres, détourne le regard et se referme sur lui-même, passant sa main droite sur son bras gauche, comme pour se protéger et éviter d’avoir à réfléchir trop longtemps pour répondre à ces questions trop intenses pour lui.

— Tu veux que je te dise la vérité ? J’ai horreur quand tu pars. Tu me laisses seul, et ça me fait encore plus culpabiliser de ressentir cela parce que je ne veux pas être celui qui brisera ton rêve de musique.

Jacob a fait trop de sacrifices pour en arriver où il en est, et Kennedy le savait quand ils se sont rencontrés, quand ils ont entamé leur histoire commune, quand ils se sont mariés. Il ne peut pas lui dire d’arrêter, ce ne serait pas juste, ce n’est pas bien.

— T’en as bavé pour réussir, et ça me rend fier de te voir t’épanouir. Alors non, je n’aime pas quand tu t’en vas, mais c’est un mal pour un bien, parce que quand tu reviens, tu es heureux, épanoui et ça me convient très bien.

C’est d’ailleurs pour cette raison que Ken a décidé de postuler pour ce poste de scénariste publicitaire pour cette nouvelle entreprise, la Cavendish Prod., c’était pour lui le moyen de trouver de quoi s’occuper, de ne pas sombrer dans le marasme quand il se retrouve seul. Il a également le reste de sa famille pour se soulager, pour ne pas rester isolé trop longtemps.

— Je savais en t’épousant que tu allais partir souvent, j’en étais conscient, et ça n’a pas changé, je renouvellerai encore mes vœux s’il le faut, mais ne me demande pas d’être heureux quand tu t’en vas.

Il marque une courte pause tout en cherchant ses mots avant de reprendre.

—  C’est l’histoire d’un jour ou deux pour que je retrouve mes marques à chaque fois. Et une fois ce délai passé, ça va mieux.

Ken est déjà allé en tournée, mais ce n’est pas ce qu’il aime. Bien sûr qu’il est chanceux de pouvoir voir son mari faire ce qu’il aime, d’autant plus qu’il est doué – en étant parfaitement transparent et impartial. Mais il préfère rester à la maison, bien qu’il voyage très souvent pour combler cet ennui, ce manque qu’il a toujours en lui.

Août 2021.

« Je te laisse faire ce coaster tout seul, moi, j’ai eu ma dose. Je fais mon petit tour » dit Coby à Ken, venant de finir sa barbe à papa. La fête foraine était en ville et ils avaient profité de cette chaude soirée d’été pour sortir s’adonner à quelques manèges. Il le laissa faire la queue alors que son regard s’était dirigé sur la tente de la diseuse de bonne aventure. Ce genre d’arnaques l’avait toujours fait rire. En s’approchant, il vit une dame âgée venir lui parler : « Alors, prêt à lever le voile sur votre passé ou votre futur ? » Il lui fit un petit sourire et d’un coté, il avait bien un quart d’heure à tuer, le temps que Ken fasse la file d’attente et l’attraction en question. Il ne croyait pas à tout ça : la divination, les cartes de tarot. Ca donnait de l’argent aux charlatans et ça faisait vivre les âmes désespérées mais il fallait toujours se prêter au jeu. « Sur quel aspect de votre vie voulez-vous vous interroger ? » Il réfléchit, et d’instinct, il dit « L’amour ». Ils venaient de fêter leurs deux ans de couple. Les discussions d‘emménager ensemble semblaient de plus en plus fréquentes et Coby avait peur – cela signifiait qu’il devait dire à son indépendance et sa solitude chérie, ses petites habitudes. Et vivre avec quelqu’un n’avait pas la même mesure que de passer dans l’appartement de l’un ou l’autre. Elle fit un mélange, lui demandant de couper avant de se lancer dans un tirage à trois cartes. Il tira la première carte, celle du passé. « Le pendu – vous sembliez ne pas savoir vous y prendre pour trouver quelqu’un. Du moins, vous avez dû changer de méthode, vous remettre en question et questionner votre perception du couple. » Coby ne commenta pas, roulant des yeux avant de choisir une deuxième carte, celle du présent. « L’Amoureux mais il est à l’envers – vous semblez bloqué. Vous ne parvenez pas à choisir. C’est comme si quelque chose vous retenez : l’approbation de votre famille ? vos choix de vie ? Vous n’êtes pas prêt à assumer cette nouvelle partie de votre vie. » Coby fronça les sourcils, ayant l’impression d’assister à une véritable prouesse de sorcellerie. La divinatrice l’invita à lire maintenant le futur. « La Tempérance – il n’y aura pas d’autre choix que de parler et de s’exprimer si vous souhaitez vaincre vos propres démons et retrouver une harmonie dans votre couple. La patience… comprendre le point de vue de l’autre… » « Oui, okay, j’ai compris, c’est la merde. » dit Coby avec un petit rire nerveux. « Mais pourquoi croyez-vous cela, jeune homme ? Ce ne sont pas ce qu’ont dit les cartes. Vous ne pensez donc pas être heureux en amour ? » dit-elle, en arquant un sourcil, circonspect. « Je ne pense rien, tenez, voici mon argent, merci et au revoir. » dit-il, maintenant, l’air frustré et énervé, partant de la tente pour aller rejoindre Ken.

Maintenant.

Il le regardait, tendu. Il sentait tout autant la tension chez son époux. Son cœur se serra à la seconde où il l’entendait parler, lui confiait son malêtre à chaque fois que le Monaghan partait. Coby ne pouvait même pas répliquer aevc des excuses car il savait qu’elles ne seraient pas sincère : partir à l’aventure, jouer pour la foule, quitter le quotidien le faisait joyeusement frissonner – une addiction dont il ne pouvait se passer. Il sentait ses yeux humides parce que lui-même avait peur de cette ultime question que pourrait lui poser Ken un jour : « C’est moi ou c’est la musique ? » et qu’il devrait choisir la seconde option. Peur irrationnelle.

Il se leva de son transat, lui tendant la main avant de venir lui donner une étreinte, le serrer fortement dans ses bras, plongeant sa tête dans son cou. « Je… Merci de te confier à moi. » que pouvait-il dire d’autre ? « Y’a rien à faire, t’es le meilleur. » Et c’est pour ça qu’il l’aimait – parce qu’il savait qu’avec d’autres, cela ne se serait jamais passé comme ça, avec d’autres, le couple n’aurait pas fait long feu. « L’important, c’est que je suis là maintenant, pour les deux prochains mois même donc… » Il l’embrassa spontanément, goûtant à ses lèvres qu’il n’avait eu guère le temps de retrouver depuis la veille. « Tu peux me mettre de la crème solaire ? » lui demanda-t-il, sans soigner sa transition. « Même s’il ne fait pas quarante degrés, j’ai une peau à soigner » fit-il avec un petit rire. « Puis accessoirement le prétexte de recevoir un massage, j’admets. » dit-il avec un petit rire sournois. Se changer les idées, s’évader, c’est ce que se répétait Coby. Le vent avait pris une mauvaise tournure au début mais il souhaitait le changer.

La conversation a pris un tournant qu’il ne s’attendait pas à devoir emprunter. Il faut dire qu’il n’avait pas prévu de parler de ce qu’il ressentait quand son mari partait en tournée… et il a préférer dire la vérité, être le plus honnête et le plus juste possible pour éviter de devoir revenir là-dessus ultérieurement en laissant la situation s’envenimer. Il ne veut pas en venir à un point où la conversation ne sera plus possible, c’est idiot, mais l’inaction, le manque de conversation et de discussion sérieuse, c’est ce qui pousse un couple à sa perte. Ils ont déjà tellement de différences qu’en ajoutant de nouvelles serait idiot.

Alors qu’il termine de parler, il voit Coby se lever de son propre transat, lui tend la main pour le tirer à lui afin de le serrer tout contre sa poitrine, son nez venant se loger dans son cou. Il sourit, frissonne en sentant la peau de l’autre tout contre la sienne.

— Je… Merci de te confier à moi. Y’a rien à faire, t’es le meilleur.

— Ouais, je sais, mais merci de me le dire encore, j’adore ça, qu’il se vante faussement tout en riant et en venant déposer un tendre baiser sur la peau de Coby.

Il n’est pas du tout vantard, mais pour rire, il lui arrive de le faire ou pour amuser la galerie aussi, ce qui revient plus ou moins au même en réalité.

— L’important, c’est que je suis là maintenant, pour les deux prochains mois même donc…

Et pour conclure cette phrase, Jacob vient l’embrasser fougueusement en attrapant son visage entre ses mains. Un baiser qu’il vient prolonger autant qu’il le peut, puis le délaissant afin de reprendre son souffle.

— Tu peux me mettre de la crème solaire ? Même s’il ne fait pas quarante degrés, j’ai une peau à soigner.

Alors… oui, se protéger c’est important, mais d’où vient cette phrase sortie de nulle part ? Au moins, il évite de revenir sur ce qui a été dit, sur les problèmes. La discussion est enterrée, et ils sont d’accord sur ce qu’ils avaient à se dire.

— Puis accessoirement le prétexte de recevoir un massage, j’admets.

Ken lève les yeux au ciel tout en attrapant le pot de crème qui n’est pas très loin.

— Oui, alors t’es au courant que je vais t’en mettre uniquement sur le visage ? Il est hors de question que tu te mettes torse nu, j’ai pas envie que tu choppes la mort.

Et puis il faut dire que tomber malade en pleine mer, ce n’est pas la meilleure des idées à avoir, il leur faudra indéniablement du temps pour retourner au port de Bristol, et surtout, il faudra ensuite avoir un rendez-vous avec le médecin, ce qui n’est pas forcément gagné.

Néanmoins, Kennedy met un peu de crème solaire dans la paume de sa main droite et vient appliquer délicatement celle-ci sur le visage de son époux, évitant les zones sensibles telles que les yeux, les narines ou la bouche.

— T’as des idées de ce que tu vas faire pour t’occuper pendant ces deux mois qui vont arriver ?

Ils sont déjà sur la mer Celtique, une idée ravissante pour décompresser et prendre du temps rien que tous les deux, loin de la civilisation et des bruits parfois envahissants. Kennedy a toujours aimé s’isoler de temps à autre pour mieux respirer et s’imprégner de la beauté de la nature. Alors c’est vrai que son mari n’a pas forcément les mêmes centres d’intérêts et lui demander ce qu’il a envie de faire prochainement, ça peut être le moyen de se mettre d’accord sur la suite des événements.

Un moment de tendresse qu'il cherchait à faire naître - c'était toujours sa bouée de sauvetage après des discussions sérieuses et des moments tendus. Montrer qu’il ne fallait pas s’arrêter à cela mais plutôt qu’il fallait dépasser le problème. Face à sa demande de crème solaire, il arqua un sourcil, grimaça avant de lui lancer un air de défi. N’était pas Coby qui voulait et il avait bien quelque chose en tête. Mais il le laissa s’exécuter pour passer de la crème sur son visage – parce qu’après tout, Ken avait raison, on ne laissait pas le visage de coté. Il eut juste un petit rictus, sourire en coin pendant qu’il s’exécutait. Il prêtait néanmoins une oreille attentive à ce qu’il lui demandait. Ce qu’il allait faire pendant ces deux prochains mois ? Il en savait foutrement rien, car il ne savait même pas ce qu’il allait faire demain. La planification et la vision à long terme, ce n’était pas ces trucs. Il y avait son groupe et ses tensions mais il avait aussi et surtout sa petite routine à Bristol – pouvoir aller voir un film et il savait que Ken serait partant pour aller au cinéma, la bataille aurait plutôt lieu sur le choix du film. Aller à sa librairie préférée, prendre un café et se laisser vivre. C’était plutôt complet comme programme pour lui ? Et avec Halloween et surtout les fêtes de fin d’année, il savait déjà que ces deux prochains mois seraient remplis avant de partir pour le Canada et le Nord de l’Amérique pour un long mois de janvier.

« Profiter d’être avec toi. Et je ne dis pas ça pour te flatter. » dit-il avec un petit sourire avant de s’apercevoir que Ken en avait fini avec la pommade. « Mais ne referme pas cette crème ! Bien sûr que je comptais me mettre torse nu. » déclara-t-il avec un petit rire, s’empressant de retirer son haut. « Ca va, Mrs l’infirmière. Il fait 15 degrés et y’a du soleil donc pour cette période de l’année, j’en profite encore bien. J’ai pas dit que j’allais plonger – pas encore ! » provoqua-t-il pour le taquiner. Bien sûr qu’il aimait que Kennedy soit aux petits soins avec lui mais dans sa tête, il avait encore ses vingt-ans, toujours chaud bouillant pour tester les pires choses pour son corps. Il ressentait le vent frais lui caresser le ventre. « J’ai peut-être pas fait Survivor mais je sais me montrer résister. » dit-il en faisant un clin d’œil avant d’attraper ses lunettes de soleil. Il continuait dans son rôle de pitre. « Et puis le chaleur, l’été, le soleil… tout est dans la tête » dit-il en faisant juste un mouvement de tête, fier des bêtises qu’il avançait. Réglant son transat afin qu’il soit couché, il s’allongea sur le ventre. « Mon dos est tout à toi, chéri » fit-il d’une voix fluette et guillerette. « Y’a des choses que t’as envie de faire cette semaine ? »

Il lui demande son programme, ce qu’il compte faire, mais en fait, Kennedy sait très bien que Coby ne planifie pas à ce point ce qu’il doit faire, il préfère être dans le moment présent et se laisser porter par ses envies et désirs. En temps normal, il ne demanderait pas, mais en fait il cherche à faire la conversation pour tenter de dépasser le moment gênant qui vient de se passer suite à une incompréhension complète. Il n’avait pas envie de parler de tout cela, mais ce qui est fait est fait, inutile de ressasser le passé en boucle. Néanmoins, il fait l’effort de répondre à sa question, peut-être en faisant un peu le canard, mais c’est l’intention qui compte non ?

— Profiter d’être avec toi. Et je ne dis pas ça pour te flatter, qu’il dit en souriant, fier de sa bêtise. Mais ne referme pas cette crème ! Bien sûr que je comptais me mettre torse nu.

Ken lève les yeux au ciel face au comportement puéril de son mari. Dès qu’il s’agit de provoquer, de faire le pitre, il est le premier. Néanmoins, il ne se cache pas lorsque Coby retire son haut, il regarde, sans vergogne les délicieuses courbes du corps de celui dont il partage la vie, ce serait un crime de ne pas le faire.

— Ça va, Mrs l’infirmière. Il fait 15 degrés et y’a du soleil donc pour cette période de l’année, j’en profite encore bien. J’ai pas dit que j’allais plonger – pas encore !

Quand il le regarde, il se met à rire immédiatement en remarquant quelque chose. Oui, il ne fait pas froid, ce n’est pas ce que dit son corps en tout cas vu la réaction épidermique de Coby.

— Bah voilà, avec tes conneries, t’as les tétons qui pointent, grosse cochonne.

Bien sûr qu’il fallait le dire, bien sûr qu’il devait se moquer. Qui serait-il pour ne pas sauter sur l’occasion ? Kennedy est un grand gamin lui aussi, même s’il a plus le sens des responsabilités que son mari.

— J’ai peut-être pas fait Survivor mais je sais me montrer résistant.

— Ouais, j’vois ça, pouffe-t-il alors que l’autre met ses lunettes de soleil.

Il soupire doucement en continuant d’écouter ses âneries. Coby finit par mettre son transat en position allongée pour se coucher dessus, lui délivrant la vue de son dos nu.

— Mon dos est tout à toi, chéri.

Bien sûr que Ken comprend l’appel du pied du brun. Il faudrait être complètement idiot pour ne pas comprendre les sous-entendus bien présents dans cette phrase. Mais il a une autre idée derrière la tête, juste pour rabattre son caquet. Il vient alors se mettre en position.

— Y’a des choses que t’as envie de faire cette semaine ?

Et juste après cette question, Ken vient s’asseoir de tout son poids sur les fesses de l’autre et commence à lui mettre de la crème partout sur le dos, peut-être un peu trop, mais comme le produit est froid, ça doit lui faire un drôle d’effet à Coby. Et avec un sourire très mutin, le masseur commence à jouer des mains mais de façon un peu… excessive.

— Profiter d’être avec toi mon chéri, dit-il en faisant un mouvement un peu plus fougueux que les autres au moment de dire le mot chéri.

Bien évidemment qu’il ne va pas lui faire mal, le but n’est pas là, juste de l’embêter un peu. Et ça, il sait très bien le faire Kennedy, il n’y a pas à dire, c’est même devenu un sport national pour lui. Une fois qu’il a terminé le massacre, il se penche en avant pour embrasser le haut du crâne de Coby et retourne s’asseoir dans son transat pour se remettre face au soleil.

— En fait, j’en sais trop rien. J’hésitai à aller au refuge animalier pour adopter un chat.

Cette fois, ce n’est pas une blague, il est très sérieux, ça fait plusieurs semaines qu’il y réfléchit, mais il aimerait avoir un peu de compagnie à la maison, et peut-être que voir ce petit être au loft éveillerait des instincts chez Coby… Ken voudrait être père, il sait que Coby n’est pas prêt pour ça, mais… l’adoption prend du temps et il faudrait se décider avant qu’ils ne soient trop vieux pour avoir un enfant. Un chat, c’est un bon début non ? Et puis Kennedy a toujours adoré les animaux, particulièrement les félins, il n’est pas fan des chiens, en a parfois même un peu peur pour être transparent.

— T’en penses quoi ?

Mais il ne prendra pas de décision sans avoir l’avis de son époux, une telle décision doit être prise à deux, on n’adopte pas un animal par pure fantaisie, ce doit être réfléchi et surtout consenti par tous.

Il ferma les yeux, relâchant les muscles de son corps avant de sentir un poids s’écraser sur ses fesses. Il lâcha un bruit sourd, grimaçant. La montagne de muscles le battait facilement. Profitant des premières caresses qui étalaient la crème, il ne put cependant pas passer à coté de la tonne de crème qui s’étalait encore et encore et même si le temps pouvait être agréable, il ne faisait pas non plus chaud à faire sécher et pénétrer la crème rapidement. Les mouvements de mains devinrent à la limite du désagréable, ayant l’impression de subir un massage déplaisant. « Y’a pas à dire, tu te débrouilles comme un… chef » dit-il alors qu’il avait l’impression de reprendre sa respiration, ayant la sensation d’avoir été en apné pendant de longues minutes. Il eut du mal à se redresser avant de se rasseoir sur son transat, l’air contrarié, la mine renfrognée. Il voulait jouer à cela ? Il n’allait pas se laisser faire.

Il se leva, lui faisant face avec un grand sourire et comme une rockstar qui se laissait tomber pour se faire rattraper par sa foule, il se laissa tomber sur Kennedy, ne manquant pas de s’essuyer avec l’extra de crème qui restait de son dos. D’une mine faussement désolée, il continua dans la provocation « Oh, désolé, la grosse cochonne en a mis partout. J’en connais un qui va devoir retirer son haut. » alors qu’il était à deux doigts de lui tirer la langue. « Espérons que le chat ne pissera pas sur toi. » continuant dans la trivialité. Il avait bien entendu – et il était pour, à vrai dire. Ce n’était pas comme les chiens où il fallait constamment être présent, les faire sortir, veiller à leurs besoins. Les chats avaient au moins la faculté de pouvoir s’en sortir tout seul et d’être plus indépendant. Retrouvant un semblant de sérieux en se relevant, il dit : « Oui, adoptons un chat. On peut faire ça dans la semaine. En tout cas, faire un premier repérage. » Il avait eu un chien durant son adolescence – jamais de chat mais il se rappelait toujours avoir un bon souvenir avec eux lorsqu’il rendait visite à des amis. « Tu veux un chaton ? Un matou à la retraite ? » Il se dirigea vers l’arrière, regardant les vagues. Il avait envie de piquer une tête mais elle semblait beaucoup trop froide et il était incapable de juger si cela était trop dangereux ou non. Au moins, l’eau froide aurait le don de totalement le réveiller.

Ces moments méritent toute leur place dans la mémoire de Ken. Combien même ils peuvent être délirants ou même idiots, ce sont ceux-ci qu’il chérit le plus, parce qu’ils leur ressemblent à tous les deux. Jacob et Kennedy sont barrés, et ils assument cette différence, ils assument qui ils sont et tant pis si les autres n’apprécient pas ces caractéristiques qui leur sont chères. Alors oui, est-ce qu’il a pris un malin plaisir à tartiner le dos de son mari ? Complètement. Est-ce que ça l’a fait rire de lui dire que c’était une grosse cochonne ? Indéniablement. Regrette-t-il ? Clairement pas.

Et le pire, c’est que lorsqu’il voit Coby se relever, un grand sourire au visage, il sait que la vengeance ne va pas tarder. Il ne répond même pas à la question de Ken, pas pour le moment, non, il se laisse tomber sur lui, et vient étaler la crème en trop qu’il a sur le dos sur le t-shirt de l’autre.

— Oh, désolé, la grosse cochonne en a mis partout. J’en connais un qui va devoir retirer son haut.

Impossible de se retenir, il explose de rire en l’entendant parler et par contre, il ne retire pas son vêtement, pas fou, il n’a pas envie de crever de froid, d’autant qu’il est plutôt frileux.

— Espérons que le chat ne pissera pas sur toi.

Et là, Kennedy se calme, mais commence à avoir un sourire béat aux lèvres, parce que l’autre semble corroborer le fait qu’il veuille lui aussi adopter un petit félin, et immédiatement, l’autre commence à avoir plein d’idées en tête, notamment du bricolage pour lui faire lui-même un arbre à chat fait maison, ou encore même des idées de jeux à acheter.

— Oui, adoptons un chat. On peut faire ça dans la semaine. En tout cas, faire un premier repérage. Tu veux un chaton ? Un matou à la retraite ?

Coby se lève et l’autre en fait de même pour le suivre avant de l’attraper dans ses bras pour le soulever un peu et l’attraper comme il le fait habituellement pour que son beau musicien vienne mettre ses jambes autour de sa taille.

— Peu importe, je veux juste donner une belle vie un à animal, et on prendra celui qui nous choisira.

C’est comme ça qu’il faut faire en règle générale, laisser la petite bête choisir, celui qui vient est généralement celui qui t’adopte. L’adoption en réalité se fait dans l’autre sens, ce n’est pas à l’humain de choisir, mais à l’animal et le lien se créera facilement ensuite.

— Je t’aime tu sais… qu’il vient dire avant de lui capturer les lèvres grâce aux siennes, forçant un peu le passage pour que sa langue vienne jouer avec celle de son mari.

Il ne le repose toujours pas, le regard un peu taquin, il l’entraîne avec lui à l’intérieur de la cabine du bateau pour l’asseoir sur un des comptoirs de la petite cuisinette. Ken pose ses mains sur les cuisses de Coby et continue de le déshabiller du regard, de le regarder comme il regarde la prunelle de ses yeux.

— J’ai tellement d’idées de trucs qu’on pourrait faire ensemble pour le loft, ce chat deviendrait dingue, notamment un plan d’arbre à chat qu’on pourrait construire nous-mêmes !

Est-ce qu’il y pense depuis plusieurs semaines à tout ça ? Carrément. L’idée a germé quand Coby est parti en tournée, et c’était un projet qui l’a aidé à se sentir mieux, à ne pas se laisser envahir par la tristesse. Alors, oui, il est heureux de pouvoir concrétiser tout cela, encore plus heureux en voyant que son alter ego est d’accord avec cette idée.

Il se fit attraper la main par Ken, souhaitant le porter. Il avait toujours une montée d’excitation mais à la fois de complexe dans ce genre de situation – il savait qu’il ne faisait pas le poids face à la montagne de muscles. Il s’accrocha fermement à sa nuque, il se laissa porter, lui faisant totalement confiance et l’écoutant parler. « Je t’aime aussi » dit-il avec un petit sourire, répondant avec envie à son baiser. Il se fit porter jusqu’à l’intérieur du bateau avant d’être déposé telle une marchandise sur le comptoir. C’est bon, il voyait Ken repartir dans l’un de ses grands délires – il suffisait pour Coby d’allumer un brin d’étincelles d’espoir qu’il voyait son mari partir sur la Lune avec sa fusée. « Oui, ou on peut carrément lui laisser notre chambre et nous, dormir sur le canap’. » dit-il d’une teinte sarcastique bien qu’il était d’accord d’entreprendre des constructions à deux. Il avait tout sauf envie d’un chat capricieux parce qu’il aura été trop gâté par l’un de ses pères. « Mais t’inquiète, il sera bien traité. » Coby n’était pas non plus un monstre – et s’il avait répondu à l’affirmation pour un chat, c’était pour pleinement s’en occuper.

Ne le quittant pas des yeux, il sentit toujours les caresses que lui prodiguait Ken sur ses cuisses. « Tu sais, si tu veux me déshabiller, tu peux ? « dit-il d’un petit sourire taquin, cherchant son regard. C’est clair quil y avait plus confortable comme lieu pour le faire qu’un bateau mais Coby était parti depuis deux semaines, le manque s’était fait sentir et ses précédents appels de phare n’avaient visiblement pas marché. L’un de ses doigts se déposa sur la chemise de son cher et tendre, descendant de haut en bas pour venir jouer avec sa ceinture. « Mais je peux patienter… » dit-il, l’air renfrogné. Si le sujet du chat avait son importance capitale, Coby ne voulait clairement pas dévier la direction de la conversation.

Coby vient carrément lui proposer de lui laisser leur chambre pour eux aller dormir sur le canapé. Il se met à sourire, non peut-être pas à ce point-là, mais au moins le matou pourra aller dormir avec eux, et ça, même Coby ne pourra pas nier que c’est trop mignon. Ken avait un chat quand il était petit, c’était un vieux pépère et il a eu une fin de vie heureuse. La mère de la fratrie Swann a toujours veillé à donner de bonnes valeurs à ses enfants, toujours aider les autres, toujours faire le bien autour de soi, et ce sont des valeurs importantes pour eux, à tel point qu’adopter une petite bête en refuge est un geste significatif pour lui.

— Mais t’inquiète, il sera bien traité.

Ce qui veut clairement dire qu’il est d’accord avec l’idée d’en avoir un. Cela rend Kennedy encore plus heureux, le fait de pouvoir avoir un animal à la maison signifiera pour lui l’arrêt de la solitude, le fait de pouvoir avoir une compagnie quand il sera tout seul. C’est un grand pas en avant et il s’en veut de n’avoir pas osé en parler avant.

— Tu sais, si tu veux me déshabiller, tu peux ?

Tiré de ses pensées, Kennedy le regarde, un peu perdu, même perplexe tandis qu’il comprend finalement ce qu’il est en train de lui suggérer. Et de fait, un petit sourire vient illuminer son visage alors que le doigt de son mari se pose sur le haut de sa chemise pour finalement descendre jusqu’à sa ceinture avec laquelle il joue.

— Mais je peux patienter…

— Si tu peux attendre alors… qu’il s’amuse à lui rétorquer d’un air entendu et en se reculant un peu.

Il finit par le toiser avant de se diriger vers l’escalier qui permet de descendre vers leur chambre qui se trouve dans la cale du bateau. Il lui adresse alors un petit clin d’œil entendu avant le regarder et de lui dire doucement avec cette voix amusée et pleine de lubricité.

— C’était une invitation à me suivre si jamais t’avais pas compris.

Le bateau n’est peut-être pas très grand, mais il possède trois pièces fonctionnelles : une chambre avec pas mal de rangements pour les vêtements et l’équipement pour plonger et nager en pleine mer ; une petite salle de bain équipée d’un adoucisseur d’eau (panneau solaire sur le toit du bateau pour chauffer l’eau de la douche) et surtout et enfin une grande salle de vie avec cuisine et petit écran plat pour la télévision et manger. Le strict minimum pour une bonne excursion. Cet endroit, ce véhicule pour être exact, c’est son refuge, il s’y sent bien, et la mer autour de lui le relaxe toujours.

Enfin dans la chambre, Kennedy se positionne dans le lit, allongé dessus, les chaussures retirées tandis qu’il attend que son conjoint le rejoigne pour commencer à le câliner dans un premier temps. Il veut de la tendresse, il veut qu’il soit doux, il veut qu’ils puissent profiter de leurs retrouvailles comme ils se le doivent après deux semaines de séparation.

Avec un petit sourire attendri, il le regarda s'éloigner pour aller jusqu'à la chambre du bateau. Autant, il pouvait y passer des après-midi, autant jamais il y passerait la nuit. Dormir sur un bateau l'angoissait pour des raisons qu'il ne comprenait pas. Il marcha alors, torse nu, d'un pas lent, pour arriver jusqu'au lit où gisait Ken, l'attendant pour qu'il s'allonge à ses cotés. Il s'arrêta quelques instants sur le pan de la porte, le regardant, aimant cette vision. « Mon homme poisson... » souffla-t-il d'un air attendri avant de finir enfin sur le lit, se jetant presque sur le matelas avant de se coller à lui, mêlant son bras au sien, faisant en sorte d'être blotti contre son corps. « A quoi penses-tu, Mr. Swann-Monaghan ? Qu'est ce qui se cache sous ses pensées ? » dit-il alors qu'il plantait son regard dans le sien. Il s'allongea complètement, regardant le plafond, sentant le bruit imperceptible des vagues. « Je me rappelle la première fois où tu m'as emmené ici, j'admets, je me suis dit : il doit emmener tous les beaux gosses qu'il croise. » dit-il avec un sourire carnassier qui se dessinait sur son visage. Coby n'avait pas d'endroit à lui comme ça - c'était plutôt ses tournées, ses dépaysements qui lui faisaient du bien, quand c'était loin de Bristol, quand c'était loin du Royaume-Uni. « T'as jamais pensé à partir dans une tournée maritime : ou juste vivre dans un bateau ? » lui demanda-t-il par curiosité alors qu'il savait qu'au cours de ces dernières années, la question avait pu émerger par moments.

Ce bateau c’est son refuge, son endroit à lui où il se sent bien, son endroit qui lui permet de s’évader, de ne plus penser au stress du quotidien, aux angoisses d’une personne aimée qui s’éloigne pendant quelques temps. Quand Kennedy est en mer, c’est comme s’il oubliait toute la négativité pour se concentrer uniquement sur le positif. Ce n’est peut-être pas le plus beau des bâtiment, il en existe de bien mieux, mais il n’a jamais songé à se séparer du premier qu’il a acheté, suite à sa participation à Survivor. Il avait besoin de retourner près de l’eau, et c’était pour lui le meilleur moyen d’y parvenir.

Allongé, sur son matelas, il regarde Coby apparaître à l’encadrure de la porte, se posant dessus, et quand il le voit, il sait qu’il est chanceux, qu’il a bien fait de l’épouser.

— Mon homme poisson…

Il secoue la tête en levant les yeux au ciel, ce surnom est tout sauf sexy, et il lui donne même l’impression qu’il pue, mais venant de la part de Coby, ça ne peut pas être ça, il dit ça gentiment et surtout c’est son regard qui transmet toutes les émotions désirées. C’est ça qu’il aime chez lui, la façon dont il le regarde, comme s’il était la meilleure chose qui soit sur Terre.

Puis Coby se jette sur le matelas, venant se coller contre son mari, leurs bras emmêlés dans une étreinte délicate. Il aime ces moments de tendresse, il aime cette douce chaleur qui émane du torse nu de son mari. Ces moments, dans cet endroit, c’est pour lui ce qui se rapproche le plus d’une place mentale, d’une safe zone.

— A quoi penses-tu, Mr. Swann-Monaghan ? Qu'est ce qui se cache sous ses pensées ?

— Juste combien je t’aime.

C’est vrai il l’aime. Il l’aime terriblement. C’est comme ça depuis qu’ils se sont rencontrés, encore plus depuis qu’ils se sont mariés.

— Je me rappelle la première fois où tu m'as emmené ici, j'admets, je me suis dit : il doit emmener tous les beaux gosses qu'il croise.

S’il devait dire la vérité, ce n’est clairement pas ça. Il n’a jamais ramené grand monde sur son bateau. C’est même au contraire un lieu presque sacré pour lui, il ne le profane pas en ramener n’importe qui.

— Si tu savais, j’ai baisé dans tous les coins de ce bateau, ironise-t-il avec un petit sourire satisfait au visage, mais ne le laissant pas dupe quant à l’idiotie de cette phrase qui n’est pas du tout le reflet de la réalité.

Non, en fait, il n’est pas comme ça Ken. Oui, il a eu des relations, oui il a déjà eu des plans d’un soir, comme pas mal de monde, mais… ce n’était pas sérieux pour lui. Lui il avait besoin de plus, de sentiments et d’amour.

— T'as jamais pensé à partir dans une tournée maritime : ou juste vivre dans un bateau ?

Il réfléchit quelques secondes, mais… non, ni l’un, ni l’autre.

— Non, pas du tout.

En fait il aime quand même son petit quotidien et son confort. Vivre dans un bateau, ce n’est pas pour lui. Il aime l’aventure, il aime camper, mais ça a des limites, une aventure comme Survivor c’était son maximum. Maximum qu’il voudrait réitérer bien entendu.

— J’aime notre loft, j’aime mon petit confort, plaisante-t-il tout en venant l’embrasser tendrement et en poussant une de ses mèches de cheveux qui tombe sur son front. Et puis, je sais que tu n’aimerais pas vivre avec moi de façon pérenne sur un bateau.

Oui, il pense à lui, il pense à son homme avant de penser à lui-même. Faire en sorte que l’autre se sente bien, c’est le principal pour lui, il n’a pas envie qu’il se sente lésé dans les décisions qu’il prendrait à l’avenir. Ken ne veut pas que Coby puisse se sentir mal.

— Et là, j’aimerais beaucoup que tu m’aimes un peu plus si tu vois ce que je veux dire…

Oui, il a envie de lui, et le fait qu’il descende dans la chambre était clairement une invitation à le rejoindre pour… autre chose que simplement parler. Après, si c’est ce que souhaite Coby, il n’ira pas contre ses attentes.