(meryl #3) no news is not always good news

08/2024 112 Linden Road, Redland

D'aussi loin qu'il se souvienne, Eddie n'avait pas profité d'un vrai jour de repos depuis sa dernière convalescence et cette pensée suffit à le faire grimacer entre deux foulées – car rester inactif, même sur son temps libre, le jeune père se l'interdit. Il n'est toujours pas capable d'appréhender une journée sans que celle-ci ne finisse par rimer avec exercice mais ses sorties jogging n'ont plus tout à fait la même saveur sans Meryl, avec laquelle le contrat passé aura finalement été de courte durée. Et pour cause, la jeune femme n'a jamais aussi discrète que ces derniers mois, et maintenir le contact n'est pas chose aisée lorsque la principale intéressée semble particulièrement occupée. L'autre option reviendrait à penser que Meryl l'évite, et Eddie mentirait s'il disait ne pas y avoir un peu songé compte tenu du peu de nouvelles que la benjamine Strange semble disposée à lui donner. Apprendre ses fiançailles avec un type dont il n'est pas le premier fan n'a pas aidé, une part de lui se demande même s'il n'espérait pas un peu que Meryl lui en parlerait d'elle-même au lieu de le découvrir sur la page de Cameron Lewis. Eddie ne prétend pas être celui à qui elle confie tout, bien loin de là, mais il croyait partager suffisamment de choses avec elle pour que l'information ne lui éclate pas en pleine figure sur les réseaux sociaux – de quoi lui permettre, au moins, de vérifier que Meryl est encore en vie.

Mais à bien y réfléchir, Eddie est peut-être devenu une source de négativité dans la vie de son amie malgré lui, entre ses hautes exigences sportives et le fait qu'il soit presque de notoriété publique qu'il supporte à petite dose son désormais fiancé. Et puis, ses problèmes de couple ont possiblement fait de lui quelqu'un d'assez mauvaise compagnie car s'il faut être honnête, sa propre sœur n'en peut plus d'entendre parler d'Halston et de la façon dont il pourrait la reconquérir. Certes, les fiançailles de la jeune infirmière ne sont bonnes qu'à lui rappeler son projet de mariage avorté mais il s'inquiète aussi de tout ce à quoi il ne pense peut-être pas. D'autres histoires susceptibles d'avoir ressurgi du côté de la jeune femme, et qui n'auraient en l'occurrence rien à voir avec lui. S'il ne cherche pas à s'accorder la moindre importance, Eddie est surtout bien trop têtu pour renoncer à l'idée d'en avoir le cœur net alors que désormais, quelques rues à peine le séparent du domicile de Meryl. Et parce que sa mémoire ne semble pas encore près de lui faire défaut, il ne lui faut pas longtemps pour partir du principe qu'elle aussi doit être de repos aujourd'hui.

L'initiative n'est pas aussi calculée qu'elle en a l'air, car une heure plus tôt Eddie n'était pas encore certain qu'il se présenterait à sa porte avec l'allure de celui qui n'a pas grand-chose à perdre. À défaut qu'une discussion soit possible, le danseur espère au moins l'apercevoir mais ce qu'il n'avait pas prévu, c'est bien que la porte lui serait aussi rapidement ouverte une fois son doigt entré en contact avec la sonnette. C'est donc officiel, Cameron ne la retient pas prisonnière. « Hey, salut. » qu'il déclare sans attendre, un fin sourire étirant ses lèvres alors que la suite, en vérité, Eddie l'a tout aussi peu anticipée. « Je me suis levé ce matin avec l'envie d'aller rendre visite à ma voisine, mais j'ai pas poussé le cliché jusqu'à t'apporter des muffins, je te rassure. » C'est vrai, l'envie de prendre de ses nouvelles lui trotte depuis plusieurs heures dans la tête mais avant de se décider, Eddie a été en proie à un certain dilemme interne. Sa fierté aurait pu le conduire à renoncer alors qu'il a souvent été animé par le grand principe de ne jamais revenir vers les autres le premier mais ici, ses questions étaient trop nombreuses pour qu'il ne fasse pas ce premier pas. Il le fallait, c'est sans doute ce qu'aurait aussi voulu Gabrielle. « Blague à part, je crois aussi que j'avais envie de voir comment t'allais. » Et cette vérité lui échappe sans qu'Eddie ne tente un seul instant de la retenir, car autant admettre qu'il n'a pas traversé le quartier sans arrière-pensée et que ce silence radio commençait à l'inquiéter. À le faire s'interroger, aussi, et ce n'est pas tous les jours que le jeune père en vient ainsi à douter de lui. « Depuis le temps, je veux dire. » Et ces derniers mois où elle a tout bonnement disparu, pourrait-il ajouter tandis que son regard retrouve celui de Meryl pour tenter d'y dénicher un début d'indice.

08/2024
112 Linden Road, Redland

La californienne culpabilise de n’avoir donné quasiment aucune nouvelle à son entourage. Lorsqu’elle avait eu cette discussion avec Gabrielle, après le passage de Mitchell, elle avait ressenti le besoin de partir, de s’éloigner de toute cette toxicité qui l’étouffait et la bouffait chaque jour un peu plus. Elle avait cette impression que quoiqu’elle fasse, qu’importe tous les efforts qu’elle pouvait faire, tout la ramenait toujours à Vegas et cette famille qui n’avait de famille que le nom. Alors elle avait embarqué son sac, n’avait pas renouvelé son contrat avec l’hôpital et elle était partie. L’américaine avait hésité à prendre un vol direct pour San Diego, couper totalement avec cet air qui lui oppressait la poitrine, mais force était de constater que malgré toute la rancoeur qu’elle pouvait avoir, elle ne pouvait se résigner à couper tout lien avec la seule famille qui lui restait. Promesse faite à Gabrielle de lui donner signe de vie et indication sur l’endroit où elle se trouvait, la californienne avait juste pris un train et était partie sans demander son reste, persuadée que de toute façon, elle ne manquerait sûrement à personne si elle venait à disparaitre du jour au lendemain. Les messages qu’elle avait pu recevoir durant son échapée avaient au moins eu le mérite de la faire mentir et elle ne cachera pas que la gamine en elle avait souri en les lisant. Elle avait répondu à certain, sans trop s’attarder, juste de quoi rassurer et dire qu’elle était toujours en vie et qu’elle allait bien. Pas de quoi contenter tout le monde, l’américaine en est consciente mais sur le coup, elle n’avait pas pu en faire plus.

D’un pas pressé, la jeune femme s’affaire dans le salon. Officiellement, elle est censée passer l’aspirateur comme elle l’a promis à Cody... la vérité c’est que ça fait une bonne demi-heure maintenant qu’elle s’amuse avec Shadow. Ce grand fou l’a mise au sol alors qu’elle farfouillait dans un placard et depuis le Husky s’en donnait à coeur joie en sautant partout et en mettant un point d’honneur à ruiner ses maigres efforts ménager. Elle est proche de la porte d’entrée quand la sonnerie se fait entendre, mettant fin au jeu de l’animal qui se met à fixer la porte d’un air dubitatif. « Pousse toi de là gros nigaud ! Tu me gênes. » Qu’elle lance en ouvrant sans vraiment hésiter. « Hey, salut. » Elle reste un instant interdite, plus surprise qu’autre chose de voir Eddie se présenter à sa porte. « Je me suis levé ce matin avec l'envie d'aller rendre visite à ma voisine, mais j'ai pas poussé le cliché jusqu'à t'apporter des muffins, je te rassure. » La californienne ne peut s’empêcher de laisser un sourire apparaitre sur ses lèvres. « C’est dommage... j’ai toujours eu un faible pour les muffins aux pépites de chocolat. » Loin d’être des plus à l’aise, Meryl ne s’attendait pas vraiment à recevoir de la visite, pour autant revoir Eddie lui fait plaisir, réellement et sa présence ici la touche.

« Blague à part, je crois aussi que j'avais envie de voir comment t'allais. Depuis le temps, je veux dire. » Meryl baisse le regard, une part d’elle culpablise, au moins un peu... mais elle n’a pas l’habitude qu’on s’inquiète pour elle, en dehors de Gabrielle au moins et elle ignore encore comment réagir avec ce genre de chose, alors elle vient écarter la porte pour lui laisser le choix d’entrer s’il le souhaite. « Je... est-ce que tu veux entrer ? Je... te dois quelques explications je sais. » Oh sur le papier, certains diraient qu’elle n’a rien à justifier, elle ne l’entend pas vraiment comme ça. Elle invite Eddie à passer la porte. « Ne fait pas attention au bazar, fait comme chez moi... » Elle n’a jamais été douée Meryl pour confesser les choses qui lui passent par la tête, et pas plus pour expliquer ses agissements et ses coups de tête. « Je suis désolée... d’avoir disparue comme ça... » Elle marque un petit temps d’arrêt, cherche ses mots. « J’avais besoin de m’éloigner... de prendre le large pour encaisser deux ou trois choses... » Elle n’en dit pas plus pour le moment, préfère laisser venir les questions s’il y en a, ou les reproches.

Dès les premières secondes de son face-à-face avec Meryl, le jeune père peut sentir que sa visite n'était aucunement attendue et comment aurait-elle pu l'être, s'il n'a pas pris soin d'annoncer au préalable cette dernière. Il aurait pu, c'est vrai, mais n'était pas assez certain que son amie accepterait de le voir pour prendre ce risque puisque ces derniers temps, Meryl était presque impossible à joindre comme à approcher. Son entrée en matière a quant à elle au moins le mérite de la faire un peu sourire. « C’est dommage... j’ai toujours eu un faible pour les muffins aux pépites de chocolat. » Qui n'en a pas un, se retient-il de demander alors qu'à trop se cacher derrière ce genre de légèreté, Eddie ne ferait que gagner du temps sur la discussion qu'il aimerait amorcer. Rien qui ne soit très simple à aborder, ça ne l'est jamais quand une part de lui peut sentir un certain nombre de non-dits mais il préfèrera toujours un dialogue difficile au fait de ne jamais crever l'abcès – ce qu'il n'applique étrangement pas toujours au sein de sa propre famille, douce ironie que celle-ci. « Je... est-ce que tu veux entrer ? Je... te dois quelques explications je sais. » Le danseur l'observe d'abord en silence, à peu près certain que sa venue éveille pas mal de choses en elle et que son intention n'a jamais vraiment été de le laisser sans nouvelles. Meryl n'a sûrement pas disparu par plaisir, mais il n'est pas aujourd'hui devant elle pour exiger des explications qu'elle reste libre de ne pas lui fournir. « En vérité tu ne me dois rien tu sais. Mais oui, je veux bien. » confirme-t-il, attendant que la voie soit libre pour effectuer ses premiers pas à l'intérieur. C'est la première fois qu'il met les pieds ici, dans cette maison où la benjamine Strange ne semble pas vivre seule et quelque part, cette idée le rassure. « Ne fait pas attention au bazar, fait comme chez moi... » Ces mots le font sourire plus grandement et pour cause, Eddie a beau être connu pour son perfectionnisme, ce n'est pas lui qui risque de pointer le désordre chez les autres ces temps-ci. « Je suis papa d'un petit garçon qui prend la maison toute entière pour son terrain de jeu alors j'en ai vu d'autres. » Sasha n'est effectivement pas en reste du haut de ses un an et demi, de quoi garantir à Meryl que son invité ne s'offusquera pas pour deux ou trois choses éparpillées.

Et puis bien vite, la discussion qu'il ressentait le besoin d'avoir avec elle s'impose presque d'elle-même. C'est un peu comme si Meryl s'attendait tôt ou tard à devoir s'expliquer, un peu comme si elle s'était préparée au fait de récolter ses questions alors qu'Eddie fait justement le choix de la laisser s'exprimer la première, pour ne surtout pas forcer quoi que ce soit. « Je suis désolée... d’avoir disparue comme ça... » Il n'a donc pas exagéré la chose de son côté, Meryl a bel et bien pris ses distances de tout et tout le monde ces derniers mois alors avec un peu de chance, ce n'est pas lui en particulier qui a eu droit à son silence. « J’avais besoin de m’éloigner... de prendre le large pour encaisser deux ou trois choses... » Ce qu'il peut comprendre, et même accepter car parfois le vase déborde, tout simplement. Meryl a disparu du jour au lendemain et c'est ce qui l'a le plus déconcerté, car il n'avait eu vent d'aucun souci que la jeune femme pouvait rencontrer en dehors d'une exposition médiatique survenue au même moment que la sienne. Était-ce toutefois suffisant pour lui donner envie de tout plaquer ? Il en doute fort mais Eddie n'est pas non plus dans sa tête pour savoir ce qui s'y trouve, alors il hoche lentement la sienne sans défaire son regard d'elle. « Disons que ça m'a surpris, je te reproche pas d'avoir eu besoin de prendre du recul mais je me suis forcément demandé si tu allais bien, de ton côté. » Difficile d'imaginer que c'eut été le cas, quand bien même certaines personnes ressentent aussi le besoin de tout couper pour profiter sereinement d'un nouveau bonheur – et dans ce cas, possiblement de fiançailles. Mais Eddie n'y croit pas vraiment lui, après tout Meryl n'a pas le visage d'une jeune femme parfaitement épanouie qui aurait mis les derniers mois à profit pour savourer tout ça. Ses traits sont trop froissés, son regard trop préoccupé et elle dit elle-même avoir eu besoin de digérer certaines choses, des choses qu'il ne prétend pas pouvoir identifier avec si peu d'indices. « Si tu avais des problèmes, par exemple. » il tente alors, sa voix indiquant un désir de comprendre mais sans insistance, car il n'est après tout personne pour lui demander des comptes et réclamer ses raisons. « Ou si j'avais fait ou dit quelque chose qui aurait pu te pousser à m'éviter. Je sais que je suis pas toujours d'une grande délicatesse, alors ça aussi je peux l'entendre. » Il fallait bien qu'il y vienne, même s'il se contente pour l'heure effleurer l'idée sans trop la préciser. Eddie n'a sans doute pas toujours fait les choses avec tact quand il se prend à penser, alors il ne pourrait pas en vouloir à son amie d'en avoir été quelque peu chiffonnée.