L'écho de la peur (Mac Kelly)

14/11/2024

L'écho de la peur (Mac Kelly): Elle l'a fui il y a un peu plus de vingt ans. Elle ne pensait jamais le revoir. Il vient raviver en elle cette peur effroyable... la confronte aux démons de son passée. S'en sortira-t-elle indemne?

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Je m’attendais à passer une excellente journée, comme toutes les autres d’ailleurs. C’est temps-ci, j’étais sur un véritable petit nuage. Il fallait dire que ce nouvel emploi à l’université me comblait de joie et me remplissait de fierté. Pour une fois, la routine avait un goût réconfortant. Un large sourire illuminait mon visage, alors que je verrouillais la porte de mon appartement.

Je pris place dans mon véhicule, modeste et suffisant. Je n’avais aucun intérêt pour ces grosses cylindrée tape-à-l’œil, véritables symboles ostentatoires. Non seulement je n’avais pas les moyens et/ou le désir de m’en offrir une, ces machines bruyantes me semblaient dangereusement imprudentes.

En roulant entre les rangées de bâtiments alignés, leurs façades arborant une palette de couleurs variées, je pris un instant pour savourer ma chance. Mon fils et mon avions trouvé ici un cadre de vie chaleureux et sécuritaire, un refuge où le quotidien, même dans sa simplicité, offrait une paix d’esprit incomparable.

Soudain, un bruit sourd retentit sous le capot. Le moteur s’éteignit brusquement et la voiture ralentit progressivement. Je mis les feux de détresse et tournai le volant pour me ranger sur le bas-côté. D’un geste pressé, je fouillai dans mon sac à main, un cadeau de mon fils pour mon quarantième anniversaire, à la recherche de mon téléphone. Ce sac, fidèle compagnon de mes journées, renfermait tout un fatras : ma tablette, mes cigarettes, ma trousse de maquillage... et bien sûr, mon téléphone.

Après avoir composé le numéro de mon assureur, qui incluait un service de remorquage, un dépanneur arriva une vingtaine de minutes plus tard. Ce dernier chargea mon véhicule sur son plateau et m’emmena dans un garage voisin, le Mi:motors, niché au fond d’un cul-de-sac, un endroit qui était parfait pour une partie de cache-cache.

Une fois arrivée, je descendis et me dirigeai vers l’accueil. Je fis tinter la clochette sur le comptoir, mais personne ne vint. Après quelques minutes dans l’attente, je décidai d’explorer et poussai la porte ouverte menant à l’atelier où ma voiture venait d’être déposée.

« Bonj... »

Et c’est là que je le vis.

Mon souffle se bloqua. Lui. Le fantôme de mon passé, celui qui m’avait détruite, physiquement et psychologiquement. Mon bourreau. Celui que j’avais fui des années auparavant, avec l’espoir de ne jamais recroiser son chemin. Je restai figée, l’esprit en ébullition. Comment était-il possible qu’il se trouve ici, à seulement quelques kilomètres de chez moi? Était-ce une coïncidence... me surveillait-il?

Mon fils, notre fils. Est-ce qu’il l’avait déjà croisé? Lui avait-il déjà parlé? Connaissait-il seulement son existence? Toutes ces questions tourbillonnaient dans ma tête, alimentant une panique grandissante et incontrôlable. Mes jambes tremblèrent violement et je dus m’accrocher au montant de la porte pour ne pas m’effondrer. Mon cœur battait à tout rompre, comme s’il allait éclater dans ma poitrine. Lentement, sans quitter des yeux cette silhouette qui me glaçait d’effroi, je commençai à reculer. Chaque fibre de mon corps était en alerte, chaque instinct me hurlait de fuir. Mais où? Qu’allait-il faire? Était-il ici pour me faire du mal? Pire encore... pouvait-il en vouloir à ma vie? La peur m’envahit entièrement, viscérale... étouffante.

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@Mac Kelly

31/03/1977

L'écho de la peur
@Miranda Blackwood et Mac Kelly

tw : mention de violence conjugale et de meurtre / intimidation

Ça fait 5 minutes que le téléphone sonne, mais personne ne répond. Le bruit de la sonnerie mélangé à celui du Heavy Metal qu'écoute Bumper commence sérieusement à lui taper sur le système. Exaspéré, Mac finit par balancer sa clé de douze dans la boîte à outils. Il essuie ses mains pleines d'huile sur les poches arrière de sa combinaison et marmonne dans sa barbe des insultes gaéliques qu'aucun de ses collègues ne comprend. Liam doit vraiment être sourd comme un pot pour ne rien entendre de tout ce bordel ! Quand il passe devant le poste de travail de Bumper, Kelly presse de son gros doigt la touche de contrôle du volume, sur l'enceinte. « Calme ta joie, Iron Maiden ! » Bumper ne relève pas. On s'est habitué au sale caractère de l'Irlandais, au cours des derniers mois. S'il n'inspire pas confiance au premier abord, tout le monde ici sait que le garage d'O'Brien est une zone de non-agression et que Kelly respecte les règles : pas de bagarre, pas de conflit, tous dans la même magouille. Le premier à déroger se verra remercié à coups de pied au cul ou de carabine. 80 piges, mais toujours aussi vivant, le vieux !

« Ouais ? » Répond-il après avoir décroché le combiné. À l'autre bout du fil, la compagnie d'assurance l'informe qu'un remorqueur est en route. « OK. » Expéditif, Mac raccroche sans dire au revoir. Pas pour rien que d'autres que lui sont censés répondre aux appels ... Mais Kate n'est pas présente ce matin et Dieu seul sait où est passé son père. Peut-être en train de donner un coup de main à l'avant ? Kelly ne pousse pas ses investigations, il a une CHRYSLER à réparer ...

* *

Il est en train de s'allumer une clope quand la grande porte du garage s'ouvre sur le camion de remorquage. Comme à son habitude, Doc réceptionne le véhicule. Mac, lui, observe de loin. Il n'a pas écouté un mot des détails fournis par l'assureur au téléphone et préfère se fier à ce qu'il voit. Pas de tôle froissée, rien de suspect au niveau des pneus. Dix balles que c'est un problème mécanique et que ça tombera dans sa cour. Tranquillement, il se rapproche pendant que son collègue inspecte. À aucun moment Kelly ne pense qu'un client ou une cliente attend à la réception l'ouverture d'un dossier à son nom. Mac n'ouvre pas de dossier. Il n'a pas la patience pour ce genre de connerie. Tu penses bien que personne n'entend la cloche, avec Maiden qui gueule à tout-va depuis 7 heures du mat' !

Et puis la porte séparant l'atelier du bureau d'accueil s'ouvre, attirant l'attention de sa vision périphérique. Il pivote en direction de la cliente, prêt à lui dire que c'est dangereux et qu'on n'accepte pas les touristes de ce côté-ci du garage. Mais les mots ne sortent pas. Mac perd sa clope en entrouvrant les lèvres de surprise. Quand il le réalise, c'est trop tard pour la récupérer. Vingt-sept ans de vie rembobinent dans sa mémoire. Face au visage de Miranda, dont les traits ont peu changé depuis Dublin, Kelly se revoit jeune homme. La bombe. Le sauvetage héroïque. Les rires. Les coups. Les pleurs. L'abandon. Des images d'elle tuméfiée lui sautent à la gueule, mais aussi des visions de son reflet dans le miroir, quand il se regardait les lendemains de veille en se dégoutant de l'avoir cognée.

Elle commence à reculer et s'il n'est pas bon pour saisir toutes les subtilités du langage féminin, Mac sait reconnaître la peur. Il l'inspire à trop de monde pour prétendre ne pas y être familier. Alors il écrase sa clope du bout du pied et jette un « J'm'en occupe. » en direction de son collègue. Doc, plus intéressé par les bagnoles que par les humains, laisse faire sans même capter la détresse sur le visage de Miranda tandis que l'Irlandais s'avance vers elle d'un pas ferme. Kelly profite qu'elle soit tétanisée pour refermer la porte sur eux. Personne dans l'atelier n'a besoin d'entendre leur conversation.

À peine le battant cache-t-il ses actions qu'il s'empare du visage de Blackwood. Sa main droite se referme autour de son menton, étalant de la crasse sur la peau de sa joue si douce qu'il en avait oublié la texture. Impossible de décrire la tendresse qu'il place dans cet acte de fermeté. Il l'attrape autant parce qu'il a peur de la voir disparaitre à nouveau que parce qu'il n'est pas certain qu'elle soit belle et bien présente face à lui. Mac a besoin de toucher, de s'assurer que ce n'est pas une hallucination. Son regard plonge dans celui de la blonde, pénètre ses iris comme pour sonder son âme. Il a confirmation que c'est bien elle à l'instant où ses muscles se bandent à son contact. Elle le crispe autant qu'elle l'enchante et il ne sait pas s'il est en colère ou s'il est heureux de la voir, mais il a cette pulsion incontrôlable qui le pousse à se rapprocher. Quand il lui pose la question, Mac n'est plus qu'à quelques centimètres d'elle et son visage la surplombe comme celui d'un monstre prêt à la dévorer. « Qui t'envoie ? » Le hasard, ou la providence ?

Kelly n'y voit pas clair dans ce qu'il ressent en cet instant, mais son système d'alerte - en branle depuis le meurtre auquel il doit son statut de fugitif - lui intime de se méfier. Le terroriste n'a pas beaucoup de points faibles. Ses ennemis le savent. Le gouvernement Nord-Irlandais aussi. S'il voulait mettre des bâtons dans les roues d'un gars comme lui, Mac irait très précisément fouiller le passé de son ennemi pour en ressortir le fantôme le plus susceptible de le faire vaciller.

Il a face à lui la personnification de ses échecs. La preuve qu'il n'a pas su vaincre la bête en lui. Le regret d'être passé à côté de quelque chose de mieux. Et il déteste ça autant que ça l'attire. Comme une seconde chance qu'on ne lui donnera pas, mais pour laquelle il serait prêt à se battre et à tuer.
Encore.